« ils nous frappent, tu dors ils frappent à la porte pour chercher quelqu’un » Encore des tabassages, vols cachés et refus de soins au CRA de Vincennes

Le matin du 13 février 2020, une semaine après l’incendie, au CRA de Vincennes les flics ont tabassés deux prisonniers.

D., un des prisonniers tabassé, s’est fait déporté avec le nez cassé à cause des flics, du sang partout sur le visage. Beaucoup de retenus parlent en ce moment de faux laissez-passer.
Le deuxième prisonnier est rentré au CRA, il est assez agé, il ne pouvait plus bouger de son lit à cause des blessures. Il n’a pas pu raconter.

Voici les témoignage de deux co-retenus de D. :

Aujourd’hui 20 policiers ont frappé D., ils lui ont menotté les mains derrière, ils lui ont écrasé sa tête sur le sol, et ils l’ont déporté avec un faux laisser-passer. Maintenant on est dans la merde, il y a que la galère, les policiers ils nous insultent, ils nous frappe, tu dors ils frappent à la porte pour chercher quelqu’un.

A 4h30 ils sont venus, d’habitude pour les vols du matin ils viennent à 6h du matin à 4-5 pour les vols cachés. Là il y avait aucun vol affiché, ils étaient au moins une douzaine. Ils l’ont entouré, ils lui ont dit lève toi t’as un vol, il a commencé à ramasser ses affaires et ils lui ont pas laissé ramasser ses affaires, ils lui ont dit tu descends. J’étais dans le lit en haut, j’ai même pas eu le temps de réagir, et si tu parles ils vont te niquer ta race. Ils l’ont descendu dans la salle de coffre, après au mitard. Après ils ont programmé son vol pour l’aprem. Ils scotchent les gens, ils les renvoient de force, ils font des laisser-passer c’est même pas des vrais c’est des faux, c’est une dinguerie ce qui se passe. La machine a cigarettes elle marche pas, la machine pour la monnaie elle marche pas. Ils sont en train de nous tuer, avec les cachetons qu’ils nous donnent, et avec la bouffe. Là ils arrêtent pas, tous les jours ils envoient des gens, il scotchent des gens. Ils ont scotché un handicapé, et avec la ceinture en plus. »

 

Voici encore un témoignage de refus de soins d’un autre prisonnier ; il s’agit de la personne décrite comme handicapée dans le témoignage précédent.

« J’ai fait 2 opérations au Maroc, qui ont couté 12000€ que j’ai récoltés grace à mes proches. Lors d’une opération, ils m’ont mis des plaques de métal dans le dos. Mais les plaques de métal m’ont déséquilibré le dos, elles étaient mal placées, ce qui m’a rendu handicapé. Je suis arrivé en France le 8 octobre 2016, et j’ai vu un médecin qui m’a dit qu’ils n’avaient pas le droit de faire cette opération, et que c’est cette opération qui m’a rendue handicapée. Depuis je suis un traitement et des examens réguliers, et je dois subir 2 nouvelles opérations pour éviter que ça ne s’empire pour mon dos. La première est prévue le 26 février 2020 et l’autre le 7 avril 2020. Mais au Centre de Rétention on m’empêche d’accéder à mon traitement, et on m’empêche
d’accéder à mes rendez-vous médicaux pour faire des examens. Ils veulent juste me renvoyer au bled. Le médecin et les infirmiers ils font pas leur boulot, c’est la merde. Ils veulent pas me laisser faire mes examens, ils me donnent des cachetons, et ils me disent que je suis pas malade. Le seul médicament qu’ils donnent ça me fait me gratter. C’est pas les médecins c’est la préfecture qui donne les ordres.

Le médecin en France m’a dit que si je reste dans cette situation ça va s’empirer, et ça me met en danger.

L’autre jour j’ai eu un vol caché. Les policiers m’ont ramené dans la salle de coffre, ils m’ont dit qu’ils allaient me menotter, je leur ai dit “non je suis malade c’est pas possible”. Finalement ils m’ont mis les menottes, et le cauchemard à commencé à l’aéroport. Il y en a 4 qui m’ont embarqué pour l’avion, ils m’ont fait tombé par terre pour me scotcher  les pieds, je me suis mis à pleurer et à faire une crise d’asthme. Ils voulaient pas me donner le médicament contre l’asthme, ils ont fini par me le donner à la fin de ma crise. Ils m’ont dit “lève toi tu vas rentrer chez toi”, j’ai pas voulu. Ils m’ont remis par terre, j’avais mal au dos là où j’ai des plaques de métal, ils ont mis un genou sur mon torse et ils l’ont écrasé. Ils m’ont mis les menottes, plus la ceinture pour serrer les bras autour du corps, et le scotch pour les pieds. Ils m’ont emmené dans une voiture jusqu’à l’avion, mais finalement c’était trop tard pour l’embarquement, et j’ai pu éviter le vol. Ils m’ont ramené au cra vers 17h je suis allé dans mon lit, et je me suis allongé et je suis resté bloqué à cause des douleurs dans mon dos après ce qui s’est passé à l’aéroport. Il y a des prisonnier.es qui m’ont porté pour m’emmener au médecin. Il était pas là, ils m’ont ramené à ma chambre. J’ai pu voir une infirmière jusqu’à 23h. »

FACE AUX CRA ET LEURS MORTS, CONSTRUISONS LA RIPOSTE. Assemblée publique mardi 3 décembre au Cicp

Dans les centres de rétention administrative (CRA), véritables prisons pour les personnes qui n’ont pas les « bons papiers », à l’abri des regards de la population, la rétention est insoutenable : bâtiments pourris, bouffe immangeable, refus d’accès au soin.

LES CRA TUENT

Les prisonniers-ères sont poussé⋅es à bout : les violences policières sont quasi quotidiennes, et dans les CRA de femmes, les violences sexistes sont fréquentes. Dans ce contexte insupportable, les infirmiers et les médecins collaborent et essayent de pacifier la situation, en filant notamment des calmants et autres médocs.
À Vincennes, depuis août deux prisonniers sont morts d’une overdose de médicaments, le dernier Mohammed, un prisonnier de 19 ans, est décédé le 8 novembre dernier.

LA GUERRE AUX SANS PAPIERS CONTINUE

Ces morts ne sont ni des accidents, ni des bavures, elles résultent de choix politiques qui s’étendent au-delà des murs de ces prisons. Parti en campagne électorale sur les plate-bandes du Rassemblement National(ex-FN), Macron a clairement affiché que la lutte contre l’immigration sera au cœur de la seconde partie de son mandat. Outre ses annonces nauséeuses sur la mise en place de quotas d’immigré⋅es, il fait construire de nouvelles places en Centre de Rétention Administratifs. En parallèle, les rafles se multiplient, les campements sont démantelés, et celleux qui se font choper sont mis⋅es en rétention et expulsé⋅es.
Réagissons!

LES LUTTES A L’INTERIEUR NE S’ARRETENT PAS

Malgré tout, à l’intérieur, des luttes s’organisent régulièrement. La
semaine dernière une grève de la faim a été lancée au CRA du Mesnil-Amelot, et depuis septembre, les tentatives d’évasion, incendies, résistances individuelles ou collectives face aux déportations et à la police sont quotidiennes.

Ce n’est surement pas l’envie et le besoin de se révolter des
prisonniers-ères qui manque, mais bien une solidarité réelle à
l’extérieur. Comment construire un rapport de force pour que ces morts cessent ?

Nous lançons une assemblée publique, ouverte à tou⋅tes celleux qui veulent lutter pour la disparition des CRA.

Pour ne pas oublier Mohammed et tou⋅tes les autres, pour combattre les violences policières et médicales dans ces prisons, pour soutenir les luttes des prisonniers-ères, partageons nos expériences et décidons ensemble de la mobilisation à mener. Venons nombreuses et nombreux, que l’on connaisse bien ou pas du tout la situation dans les CRA et construisons la riposte ensemble !

ASSEMBLEE PUBLIQUE
MARDI 3 DECEMBRE à 19H
au CICP
(21ter rue Voltaire, métro Rue de Boulets/Nation)

A bas les CRA !

«Au CRA, l’infirmerie, c’est une boucherie». Un autre mort à Vincennes, ni oubli ni pardon !

Le CRA est une machine à tuer. Luttons pour que la mort de Mohammed, prisonnier dans le CRA de Vincennes, ne soit pas oubliée.

Vendredi 8 novembre, un prisonnier est décédé au centre de rétention de Vincennes. Il s’appelait Mohammed et avait 19 ans. Il était enfermé depuis 28 jours. Au matin, ses co-détenus l’ont découvert entre la vie et la mort dans son lit. Ces derniers parlent d’une overdose survenue à
la suite d’une prise d’un cocktail de médicaments. Quand ils ont appelé à l’aide, les flics ont mis des plombes à réagir. Finalement une infirmière est appelée, faute de médecin sur place, et les pompiers ont mis une demi-heure à arriver, trop tard. Le parquet de Paris a « ouvert une enquête en recherche des causes de la mort » et la presse s’empresse de mettre en avant un mélange entre médicaments et stupéfiants.

Mais où a t-il trouvé ces médicaments, et ne sont-ils pas des stupéfiants ? A l’entrée du CRA tout est saisi et mis au coffre. Ses camarades dénoncent la responsabilité des médecins du centre, c’est eux qui ont filé ce cocktail empoisonné : « L’infirmerie, c’est une boucherie, pas une infirmerie ». Ils soutiennent que chaque jour, Mohammed recevait de l’infirmerie des pilules de valium, de tramadol et autres somnifères (des pilules colorées). Un de ses co-détenus raconte qu’il le retrouvait régulièrement dans des sales états après avoir pris les médicaments donnés par les médecins :

« Le médecin, il donne des calmants, il shoote tout le monde et après peut rentrer se coucher. Dans le centre de rétention, on traite les prisonniers comme des fous, c’est un HP, pas un centre de rétention. Tous les jours, ils nous appellent « venez chercher vos médicaments ». Et les gens, ils courent, dans l’état dans lequel ils sont »

Souvent à l’intérieur, on nous dit que les médecins administrent des calmants et tranquillisants au moment de l’expulsion et avant que les prisonnier.e.s passent devant le juge, pour qu’iels restent bien tranquilles. Le lendemain de sa mort, Mohammed devait passer devant le juge des libertés. La veille, avec ses co-détenus, ils avaient évoqué qu’il ne survivrait pas à 30 jours de plus d’enfermement.

Le CRA est un lieu d’enfermement où les prisonnier.e.s sont constamment poussés à bout. Tout pousse à leur destruction physique et psychologique. En plus de l’enfermement, les violences des keufs sont quotidiennes. De l’intérieur, on raconte de ces violences subies, par Mohammed comme par tou.te.s les autres :

« La veille de sa mort, il avait encore mal [parlant de Mohammed], il s’était fait étrangler par des flics. Tous les jours, on voit des prisonniers qui ont des bleus, des traces de coups »

« Je suis en train de voir des choses ici, que j’ai jamais vues, l’autre jour, j’étais posé avec un gars ; il avait mal au ventre, j’appelle les flics, « y a quelqu’un qui va pas bien », le flic il me regarde avec un petit sourire « il est mort, il respire ? » »

Les morts dites accidentelles dans les centre de rétentions sont loin
d’être rares. C’est le deuxième décès qui a lieu à Vincennes en trois mois. Le 19 août, un prisonnier, de nationalité roumaine avait aussi été retrouvé mort dans sa cellule. Selon les journaux, sa mort serait due à des médicaments, les prisonniers parlant d’une overdose de méthadone. Lors de cette affaire, au moment de la découverte du corps, les prisonniers avaient été sortis du bâtiment pendant des heures, de manière à ce que personne ne sache vraiment ce qu’il s’était passé.

Quand il s’agit d’un mort, il faut vite tout cacher, dissimuler, effacer. Aujourd’hui, les camarades de Mohammed craignent, qu’encore une fois, les policiers fassent tout pour étouffer l’affaire. Ils appellent à se mobiliser pour Mohammed, pour qu’il ne soit pas oublié.

Crever dans un CRA n’est jamais un accident : que ce soit à cause de la violence des keufs, du manque de soins, de l’enfermement, c’est le CRA même qui produit ces morts. Dans ce cas, les médecins sont clairement dangereux et responsables car ils laissent entre les mains de prisonnier.e.s du véritable poison.

 

L’AG contre les CRA et le collectif sans papiers Paris 1 appellent à une réunion publique, le mercredi 13 novembre à 18h, au CICP (21ter rue Voltaire).

Ne laissons pas que cette énième mort passe sous silence. Soyons solidaires des prisonniers-ères, organisons la lutte à l’extérieur.

L’enfermement des étranger.e.s et les frontières tuent.
A bas les CRA !