« J’ai l’impression qu’on n’est que des chiffres » : un prisonnier du CRA du Mesnil-Amelot témoigne

Dans l’émission du 15 octobre 2021, L’Envolée a passé un coup de fil à un prisonnier au Mesnil-Amelot. Le copain est arrivé à l’âge d’un an en France. Ça fait 5 mois qu’il est en CRA – alors que la durée légale de rétention est officiellement de 3 mois. Selon lui, la fréquence des expulsions en ce moment est en hausse. Voici son témoignage.

« Y a pire dans le monde mais en réalité ça va pas trop. En ce moment les expulsions, ça n’arrête pas. Ils font des tirs groupés : ils prennent quelques Tunisiens et les envoie tous ensemble. Des fois, il n’y a plus de places dans les avions, alors y en a un ou deux qui reviennent sur les quatre partis. Sur le papier, on est censé avoir un peu plus de libertés qu’en prison; mais dans les faits, en CRA, on ne peut pas choisir ce qu’on veut manger. Quand on mange tout le temps la même chose, ça n’a plus de goût. On perd l’appétit, on n’a plus la force de manger. On est en stress. J’ai l’impression qu’on n’est que des chiffres. »

« Il y a des personnes qui n’ont rien à faire ici, qui sont arrivés en France à l’âge de 13 ans. Ils ont suivi une scolarité en France.  Ils n’ont pas le droit d’enfermer ces gens-là. Y a des gens, quand on entend leur histoire, on a envie de pleurer. Voir sa famille se faire assassiner devant soi… comment on peut vouloir retourner dans son pays après ça? Quand vous racontez ça, on vous dit que vous êtes un menteur. Les gens, ils sont partis pour sortir de la misère dans laquelle ils vivaient. Il y a des pays où c’est tendu actuellement. J’essaie de rester positif. Quand j’entends qu’à Haïti les enfants, ils mangent des galettes de terre, je me dis que je suis pas à plaindre. »

« Moi je suis arrivé à l’âge d’un an. Ma mère m’a laissé avec mes deux frères dans une famille d’accueil. Ma tante nous a récupérés. Je suis allé à l’école française. Je ne connais pas le pays dans lequel ils veulent m’envoyer. Je ne parle même pas la langue de mon pays. Là-bas, il y a la guerre. Pour moi, l’expulsion, c’est comme une mise à mort. »

« A chaque avion qui décolle, on panique. On tremble. Toutes les dix minutes, j’ai peur. J’appréhende qu’on m’annonce une mauvaise nouvelle. Ils viennent te chercher dans ta chambre à 4 heures du matin comme s’ils venaient te perquisitionner. Après t’arrives à l’aéroport, tu te dis que tu vas pouvoir refuser le vol à ce moment, mais en fait tu te retrouves face à une équipe de ninjas prêts à te ligoter. »

« A l’intérieur, j’ai vu des actions de solidarité que j’avais jamais vu à l’extérieur. Comme j’ai aussi vu la misère pousser des gens à se faire du mal à l’intérieur. Il y a énormément de bagarres ici. Un mec s’est embrouillé avec des gens d’un autre bâtiment. Les surveillants ont organisé son tabassage en le transférant dans la zone où se trouvaient les gens avec qui il s’était embrouillé. »

 

Contre les CRA et les frontières : appel à une assemblée publique

Les centres de rétention administrative (CRA) existent depuis 1981 et servent à enfermer des personnes qui n’ont pas les bons papiers, dans l’attente de leur expulsion. Ils sont pensés comme l’anti-chambre de l’expulsion mais sont avant tout des espaces d’enfermement et de tri, des bons et mauvais sans papiers. 
L’enfermement maximal dans les CRA est de 90jours, soit 3 mois, dans des conditions particulièrement pourries. Le Covid, comme dans tous les autres lieux d’enfermement, a empiré la situation d’une part d’un point de vue sanitaire (l’accès aux droits est restreint, l’accès aux soins et l’hygiène sont quasiment inexistants dans les CRA) mais également d’un point de vue répressif puisque l’Etat profite des refus de tests PCR pour criminaliser les prisonnier-ère-s et les enfermer encore plus.
Face à ça, de nombreuses révoltes ont eu lieu cette année dans les CRA : incendie au Mesnil-Amelot (à côté de l’Aéroprot Roissy-Charles de Gaulle), grèves de la faim, révoltes et évasions. C’est avant tout pour continuer à soutenir ces luttes que l’assemblée contre les CRA en Ile de France existe et appelle celleux qui voudraient nous rejoindre ou tout simplement en apprendre plus sur les luttes dans les CRA à une réunion publique mercredi 22 septembre à 19h à la Parole Errante à Montreuil.

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« Ça fait longtemps que se centre existe, il est temps qu’il désiste » – Poèmes écrits depuis le CRA de Vincennes

Un ancien prisonnier nous a transmis une série de poèmes qu’il a écrit alors qu’il était enfermé au centre de rétention administive de Vincennes. Il y raconte les conditions d’enfermement à l’heure de la pandémie, les expulsions massives, le racisme, la justice expéditive… Nous relayons ici le premier volet de ses textes.

02-03-2021

Survivant

Avec tous ce qui se passe autour du covid

On pense sortir trop vite

En une seul nuit six arrivants

Arménien, Parkistanai, Afghan

Et chaque jour y’aura des suivants

Autour des jugements sévères

Dans cette période difficile d’hiver

On soufre de suspense, notre chance d’être libre est mince

Malgré le confinement sort où les mesure sanitaire dans notre environnement

Ça fait longtemps que se centre existe, il est temps qu’il désiste

On doit garder le moral et leurs promesse reste des expressions orales

Enfin je pense à mes amis du charle de gaulle qui mène une grève de la faim

Je leur porte mon soutien


03-03-2021

La justice sur tout et pour tous

La condamnation d’ex président Mr N SARKOZY

La justice française est un acquis

Comme la lune qui n’a pas de macquis

J’espère qu’elle est au courant de condition

Aux alentour du centre de rétention

Sans elle comme un oiseau sans aile

Je compte sur vous Mr le juge

Mes délits sont déjà payer en Pige

Je veux sortir d’ici ma fille m’attedns un jour précis

Ici les jeunes sont en FARCIS

Enfin je ne fais plus le malin

De la drogue je m’éloigne et je suis toute mesure de soins

Je travail comme il faut etre au sport je le pratique tot

Je vis à la française

Me permet de mettre ma femme à l’aise


12-03-2021

L’amour n’a pas d’âge

L’éloignement ne se traduit pas en cage

Les sentiments sont énormes

Mais les mesure sanitaire sont pas aux normes

La juge me prolonge la rétention proprement

El elle oublie ma soufrance pour le moment

En attendant l’expertise Médical

Je sais que mon Alibis et fondamental

Graçe à mes certificats Médical

Pour le moment je tien Bon

Jusqu’à quand ?

Ma patience paye

Mon Avocat sur de trouver une faille


13-03-2021

Souffrance

On mange pas à notre faim

Comme noel sans sapin

Pour régler ma situation je cours dans tous les sens

Comme un lapin

Depuis 2018 à 2021 je ne sais quand ca prend fin

Stress angoisse c’est dure c’est quoi cette poisse

Dans ce centre on compte le temps plus qu’une

Montre

Juge Procureur c’est quoi votre objectif

Vous ne réalisez pas notre souffrance

Venez nous voir ici tous ce Balance

Soyez Humain

Notre Destin entre vos mains


19-03-2021

Le mal pour le bien la rétention pour rien

Au CRA une seule bonne Pour 30 personnes

Deux lits par chaque chambre où on couche

Et les six toilettes séparaient de la douche

Deux télé collectifs ne repond pas aux effectifs

Six personnes par table au réfectoire

Comme des aller retour dans le même trottoir

Pas de gestes Barrière

Chacun le fait à sa manière

Comment la famille de Ben Mehdi va pardonner

Après le silence de tous ces années

La reconnaissance

C’est la fin d’une dinasty en Puissance

Si le Bien peut instruire, le mal ne peut que détruire

Face de nous le juge et la préfecture malgré le confinement

Mais derrière i y a l’ASSFAM et ses aplodissements

Grâce à eux on sera tous libre surement


21-04-2021

Grace à mes emmerdes j’écris ce que j’ai bien compris

La vie ici me parait facile

C’est compliqué meme avec une demande d’Asile

Ma tête va exploser

Mais l’encre va l’exploiter

Le racisme a existé

Toi tu mange le cochon

T’écoute Alain Souchon

Pareil qu’Amel Bent et ces chansons ?

Dans un kiffe philosophie être accepter comme je suis

Comme témoin ça suffit leur méthodes de wifi

Avant que tu t’exprime pas droit pour eux tu frimes

Compliqué de les raisonner dans ma tête ça fait que sonner