Virus, luttes et représailles : Vincennes, Mesnil et Rennes

Dans la dernière mise à jour sur la lutte en cours depuis vendredi dans la prison pour sans-papiers de Vincennes, on se demandait quelle était la stratégie de l’administration du Cra, quand elle avait décidé d’enfermer tout le monde dans un espace minuscule et y ramener des personnes avec le virus. Une hypothèse : la PAF et les Prefs en ont rien à foutre de la vie des prisonniers, ça c’est clair, mais elles jouent aussi systématiquement à mettre en danger leur vie. Vu qu’elles ne peuvent pas les déporter autant qu’elles voudraient (pas mal de frontières sont encore fermées, même si les vols continuent vers certains pays comme la Roumanie et l’Albanie, et d’autres sont prévus – un grèviste est menacé d’expulsion vers l’Egypte le 16 août !), elles trouvent d’autres moyens pour s’en débarasser.

Des copains enfermés à Vincennes racontent des épisodes trash qui ont eu lieu hier, et qui montrent encore une fois jusqu’où peuvent aller la violence et la hogra de la part des keufs dans ces prisons (et partout ailleurs). Pour casser la lutte des grèvistes qui, depuis vendredi, refusent collectivement la bouffe (dégueulasse) que Gepsa donne aux prisonniers, et pour les obliger à retourner à la cantine, les flics ont fouillé des cellules et ont jeté la nourriture qui était cachée à l’intérieur. Mais les retenus restent déterminés.

Pour rappel, une soixantaine de personnes sans-papiers sont enfermées à quatre-cinq par cellule dans le batiment 1 du Cra, sans que la moindre mesure sanitaire ait été prise. Au moins quatre prisonniers qui avaient été testés positifs ont été déplacés pendant le week-end dans un autre batiment, où ils sont en quarantaine et en isolement. Lundi dernier, deux prisonniers qui étaient enfermés au Cra de Mesnil-Amelot où elles avaient été testées positives ont été transférées… à Vincennes.

A Mesnil aussi le virus est en train de se propager, et la situation devient de plus en plus compliquée : les cas des personnes malades sont nombreux, d'autres transferts sont prévus, la Cimade (l'asso qui intervient dans le centre) et l'entreprise du nettoyage ont décidé d'exercer leur droit de retraite... Les prisonniers se retrouvent encore plus isolés que d'habitude : hésitons pas à appeler les cabines du centre pour les soutenir.

Hier, les prisonniers du Cra Vincennes ont été soumis à nouveau à un test collectif pour le Covid. C’est le deuxième en dix jours… Deux personnes ont refusé de faire le test. La réaction des keufs a été de les punir de la manière la plus sale : ils les ont transférés par la force dans le batiment de quarantaine où sont enfermés les prisonniers testés positifs ! Histoire de les faire tomber malades exprès.

Entre temps, une grève de la faim est en cours au Cra de Rennes depuis lundi, notamment pour dénoncer les conditions pourries d'enfermement. On relie ici le communiqué des retenus en lutte.
Force à eux et à tou.te.s les prisonniers-ères !

Communiqué des personnes enfermées au CRA de Rennes

Au Centre de rétention de Rennes, nous n’avons aucun droit ici, ils sont bafoués. On s’acharne sur nous.
Voilà comment ça se passe une journée au Centre de rétention :

Les policiers nous réveillent tous les matins, sans un bonjour. Ils claquent les portes et allument la lumière. Ils rentrent parfois dans nos chambres, la nuit, pour rien. Il n’y a pas de respect et on entend des « c’est moi le chef, je fais ce que je veux. »
Ensuite de 9h à 11h, on est dehors. Soit disant il y a le ménage donc ils ferment les chambres mais c’est encore sale après. Il y a des souris et des cafards. On va parfois demander des choses à l’accueil mais ils nous disent d’attendre ou veulent rien nous donner. Il n’y a pas de rapports humains.
Si on avait le moral, on ferait un peu de sport mais ce n’est pas le cas.

Puis à partir de 12h, ils nous appellent comme des animaux pour aller manger. Il y a une brigade qui nous laisse manger tous ensemble et on s’assoit où l’on veut alors que l’autre fait des groupes de 5 et nous place.
Parfois on a du porc alors que certains n’en mangent pas et la police nous dit « tu manges ce qu’on te donne ici. ». On nous force aussi à manger de la viande alors qu’on sait que pour certains d’entre nous elle n’est pas halal.

Puis l’après-midi, de 13h à 15h, tout est fermé. On ne peut même pas acheter une bouteille d’eau. On ne fait rien, on est des zombis, on est des animaux.
Après 15h, on ne fait rien non plus. Parfois on nous donne un ballon et parfois on ne peut même pas le prendre. On attend 19h, le repas.

De 19h à 21h, on mange puis on ne fait rien.
A 21h, ils ferment les cages. Ils nous enferment dans les bâtiments où nous avons nos chambres, comme dans un zoo. On entend aussi des phrases racistes. Dans certaines chambres il y a une télé mais pas dans toutes. On est enfermés donc si une personne essaye de se suicider, on ne peut rien faire.
On a du mal à dormir, on fait des nuits blanches et des cauchemars.

Sinon, au centre on peut acheter que des cigarettes. On a une tondeuse et un coupe ongle pour tout le monde.

Pour eux, on est de passage donc nous n’avons pas autant de droits. Certains n’ont même pas d’habits, rien. Ils nous disent « qu’il est temps que vous rentriez chez vous. »
Mais, ils ne nous préviennent pas quand les vols sont annulés. Les médecins, on les demande plusieurs fois mais on ne les voit pas souvent.
En fait, ils sont contents quand on rentre au bled.

Ce qui nous choque le plus c’est que nous ne soyons pas respectés. Qu’on nous insulte et qu’on nous pousse à bout. C’est aussi l’abandon que l’on ressent. Une personne a fait une tentative de suicide il y a quelques jours et elle n’a vu aucun médecin, aucun infirmier. Ils l’ont laissé comme ça. Et puis, le racisme aussi envers nous, la façon dont les policiers nous parlent.

C’est par rapport à tout ça qu’on a décidé de commencer une grève de la faim. On attend que quelque chose change. Pas pour nous forcément mais pour le futur, pour les autres. Pour l’instant ils font du chantage : tu manges pas donc tu n’as pas le droit de jouer à la Nintendo. C’est pour calmer les personnes.

Nous, ce qu’on veut c’est que nos droits soient respectés.

Des gars du CRA de Rennes

Soyons solidaires avec les prisonniers-ères
Liberté et papiers pour toutes et tous !

Appelons les cabines, organisons-nous à l’extérieur
pour faire sortir leurs paroles et casser l’isolement,
et n’oublions pas qui sont les responsables de toute cette merde : les flics, les juges et les prefectures,
les collabos qui font des frics sur l’enfermement
et ceux qui balancent les sans-pap !

Les prisonniers de Vincennes toujours en lutte !

Pour protester contre des conditions d’enfermement encore plus pourries que d’habitude, les prisonniers du CRA de Vincennes sont toujours en lutte. Vendredi dernier la PAF (police aux frontières) du centre a eu la géniale idée de déplacer tout le monde dans un seul batiment (sur les trois où ils étaient enfermés avant), et d’entasser les gens à quatre dans chaque cellule. En pleine canicule, cette opération a obligé certains prisonniers de dormir dans le couloir ou dans la cour, sans compter le stress de choper le virus, vu qu’il n’y a ni possibilité de distantiation sociale, ni des masques ou du gel à disposition.

Mais comme on l’a vu de manière très claire depuis le début du confinement, les keufs, les prefs et les juges aiment bien mettre en danger la vie des prisonniers-ères. Du coup voilà, un autre coup de génie : il y a deux jours, des nouvelles personnes ont été emmenées au CRA de Vincennes, dont au moins quatre avec des symptomes de Covid. Ces nouveaux prisonniers sont actuellement en isolement dans un des batiments qui avait été vidé vendredi, mais on n’a malheureusement pas plus d’infos sur leur état de santé. A quoi elle joue, l’administration de cette taule pour sans-papiers? Enfermer tout le monde dans un espace minuscuele et ramener des personnes avec le virus, pour voir ce qui va se passer?

Les prisonniers ne sont pas restés les bras croisés : après le déplacement forcé de vendredi dans le batiment 1, presque la moitié des prisonniers a décidé immédiatement de rentrer en grève de la faim. Les jours suivants, certains parmi les grevistes ont dû recommencer à accepter les repas pour des raisons sanitaires. En effet, pas mal des gens à l’intérieur ont des conditions de santé compliquées, que l’enfermement et la manque de suivi de la part du personnel médical collabo ont rendu encore plus critiques.
Mais un groupe très déter de prisonniers a continué la grève de la faim, qui entre aujourd’hui dans son cinquième jour de lutte !

En parallèle, une plainte collective a été déposée dimanche dernier à l’administration du centre, pour dénoncer ces conditions de retentions insupportables, avec les signatures de la presque totalité des prisonniers. Au début de l’article, on a publié une photo de ce document, dont vous trouverez plus bas le texte retranscrit.

Soyons solidaires avec les prisonniers de Vincennes en lutte : appelons les cabines du batiment 1 où ils sont enfermés, faisons circuler partout ces infos, organisons-nous avec des potes pour nous faire entendre depuis l’extérieur !

virus ou pas, a bas les cra !
liberte pour tou.te.s
et solidarite avec
les prisonniers
en lutte !

PLAINTE RETENU ADMINISTRATIF

Date : 09 aout 2020
Nom : Au nom de tous les detenus en centre de rétention administrative de Paris

Description des faits :
Nous sommes actuellement tous placé en centre de rétention administrative de Pairs (CRA 1) et nous sommes à plus de 60 personnes dans un batiment (CRA 1) depuis trois jours soit depuis le 07 aout 2020, après nous avoir tous regroupé dans le meme batiment et nous sommes à quatre personnes dans des très mauvaises conditions, en manque d'air et d'oxigène. Il fait très chaud, manque de la nourriture insuffisante et il y a plusieurs personnes parmi nous qui sont malades (asthmatique, nerveux, suicidaire). Et canicule depuis le 07 aout 2020 à 44 °C.
Nous souhaitons avoir un changement dans le plus bref délai.
Il y a trois personnes contaminées de VIRUS présent dans le cenre.
Il y a plusieurs en grève depuis 3 jours. Sans manger. AU REFUS.

Suivent 35 signatures

« On est 25 personnes sans manger ni médicaments » : Grève de la faim en cours au CRA de Vincennes !

Ce vendredi 7 aout 2020, la moitié des prisonniers du CRA de Vincennes se mettent en grève de la faim ! Depuis la fin du confinement les prisonniers avaient gagné le droit à la cellule individuel – au moins le temps que la situation sanitaire s’améliore. Ca fait quelques semaines que les keufs de la PAF (Police aux frontières, les matons du CRA) mettent la pression pour qu’il y ait à nouveau deux prisonniers par cellules. Les expulsions continuent vers les pays où c’est possible (principalement vers la Roumanie et l’Albanie).

Cet après-midi, la direction du CRA à décidé d’enfermer tout le monde dans le même batiment (au CRA1 pour celleux qui voudraient appeler en solidarité !) obligeant les prisonniers à se mettre à quatre en cellule. Très rapidement un mouvement collectif de résistance se met en place : les prisonniers décident de ne pas manger, ni à midi ni ce soir. Ils comptent continuer les prochains jours aussi. Certains refusent meme les médocs ! Dehors les keufs qui gèrent l’entrée et les parloirs essayent de faire partir les proches en parlant de « suspicion de covid » et « d’attente de résultats de tests pour rouvrir les parloirs ». Les parloirs se tiendront quand même.
On relaye ici des paroles de prisonniers en lutte.

 » On est beaucoup là, quatre dans chaque chambre, c’est trop ! Moi j’ai un problème de cardio je peux pas rester comme ça. Ils ont mis tout le monde dans le meme batiment, on est 60 personnes. Aujourd’hui on a pas mangé, midi et soir, on est en grève de la faim. On est 25 qui tiennent la route, les autres ont laché. Mais nous on baisse pas les bras, on va continuer. On est dans la merde ici.  »

 » On est en grève, sans manger, on est 25 personnes sans manger ni médicaments. Y a pas de places dans les chambres, y a pas de place dans la chambre pour 3-4 personnes, certains doivent dormir au sol ou à l’extérieur. Y a des gens avec des enfants et tout, pourquoi on est là? On a parlé avec la police, mais rien, y a pas de respect, ils écoutent meme pas. C’est la hoggra voilà. C’est chaud, c’est incroyable. On a demandé pourquoi ils nous ont mis dans le meme batiment, personne sait ça.  »

« On fait la grève de la faim parce qu’ici c’est tous les jours pareils, parce qu’on est pas des chiens. Tous les jours les repas c’est la même chose. L’hygiène c’est la même chose: on a quasiment pas de shampoing ici et pas de gel douche. Et ils continuent de ramener des gens ici. Ici dans cette prison, souvent ils (les keufs) ils prennent quelqu’un et il l’amène là où il n’y a pas de caméra. Après il le tabasse. Tout le monde veut se pendre en fait ici. La police veut qu’on dorme à quatre personne par cellule maintenant, dont une personne par terre. Y a des gens ils préfèrent dormir dehors dans la promenade carrément. Et les juges font que nous laisser ici alors qu’y a pas de vols possible pour plein de pays.. dès qu’on arrive le juge nous met 28 jours. Pour tout ça on est en grève de la faim. On veut retourner aux cellules individuelles et qu’on respecte nos droits. Dehors il faut que les gens manifestent en même temps que nous pour que ça change ! »

SOLIDARITE AVEC LES PRISONNIERS
EN LUTTE A VINCENNES

LIBERTE ET PAPIERS POUR TOU.TE.S !

a bas les cra