Grève de la faim et répression au CRA de Vincennes

Depuis samedi dernier, les prisonniers du batiment 2A du CRA de Vincennes sont en lutte : pendant 3 jours, ils ont réfusé de manger à la cantine, ils sont restés soudés et solidaires, mais ont dû faire face à la répression violente de la part des keufs.

Les flics ont tout fait pour faire craquer les gens et casser la lutte : samedi soir, au début de la grève de la faim, les prisonniers sont renfermés dans le batiment et ils sont fouillés dans toutes les chambres ; dimanche, un prisonnier est tabassé par les keufs, qui refusent aussi l’accès à l’infermerie pour les prisonniers malades ; lundi, les prisonniers se font réveiller par des douches incendie, d’autres tabassages ont lieu, les keufs avec les chiens ; mardi, l’eau du batiment est coupée, pas de douches ni rien.

Un prisonnier du batiment 2A raconte des conditions de vie à l’intérieur, et de ces derniers jours de luttes et de répression (à partir de la minute 35) :

CENTRE DE RETENTION

Et voici, le témoignage écrit d’un prisonnier :

On veut juste des conditions de vie normale parce que nous on vit ici c’est trois mois c’est une vraie peine de prison. Une peine mais nous on veut juste sortir, on a des enfants ici. Le CRA c’est invivable surtout à cause de la violence des policiers et aussi parce qu’il essaient de nous faire craquer. Les gens qui sortent d’ici certains deviennent fous.

Ils nous rendent fous. À l’intérieur on les voit devenir fous petit à petit. Il y a quelqu’un la dernière fois ils lui l’ont appelés pour une prise de sang, et quand il est revenu il s’est écroulé en tremblant et tout, on comprend pas si ils essaient de nous tuer parfois.

Il y a un mec qui a le bras cassé à cause de flics qui lui sont tombés dessus. On essaie de l’aider comme on peut mais le soir il crie, il peut pas dormir.

On savait pas que c’était comme ça a France, tant de racisme. Il y a même un policier qui a craqué quand il a réalisé ce qu’il se passait dans le centre. Les policiers c’est tous des stagiaires donc ils font de la merde. Ils essaient de nous faire craquer avec des fouilles tous les jours, des tabassages de gens avec les jambes et les mains scotchées…

Nous on craque ici on a envie de sortir d’ici le plus vite possible.

Samedi soir on a commencé une grève de la faim on était 28 je pense. Les policiers sont venus pour nous foutre la pression on leur a dit que la nourriture c’est immangeable. L’entreprise qui fait la nourriture c’est GEPSA ils donnent pas de sel, pas d’eau, les plats sont immangeables, c’est GEPSA on peut lire sur leurs gilets. On leur a dit aussi il y a pas de porte dans les toilettes et des toilettes sales avec des gens malades partout.

L’infirmerie fait pas sont travail. Ici beaucoup on la gale. Dès que tu viens qui tu dis que t’es malade ils donnent juste des gros calmant, c’est une pharmacie pas une infirmerie. Les infirmières sont super méchantes. Pharmacie : Valium, Rivotril, Subutex, Tramadol… les gens qui prennent ça ont les voit devenir dingues.

Cette nuit là vers 4h ils nous ont arrosés avec les douches incendies. Ils ont arrosé tous le monde, toutes les chambres. Les vêtements, les matelas, les couvertures tout était mouillé. On tremblait on pouvait pas dormir dans ce froid. Au haut-parleur ils ont dit : « si vous mangez pas demain à midi ca va continuer » Ils voulaient nous faire craquer.

Heureusement que certains ont des chambres tellement sales qu’ils dorment dans les couloirs ou dans la salle commune. Eux ils avaient les couvertures sèches. Alors on s’est mis tous dans la même salle pour se réchauffer avec les couvertures sèches et essayer de dormir.

C’était horrible, le lendemain on était plus que 18 en grève de la faim. Ils nous ont notés et après ils sont venus nous taper, juste pour en découdre ?

Le lendemain donc hier, ils ont coupé l’eau. Ça a commencé hier soir certains étaient réveillés, mais nous on s’en est rendu compte que ce matin : d’un coup plus d’eau dans les douches, robinets, toilettes. Tout le monde est paniqué ou énervé. Même la machine pour boire elle est coupée. Quand on demande pourquoi, ils disent : « arrêtez de nous casser les couilles ».

On en a marre on en peut plus des fois on pense au suicide. Même aux USA les prison c’est pas comme ça.

Les CRA existent pour isoler les prisonniers-ères, pour leur faire croire qu’iels sont seul.e.s face aux flics, aux juges, aux avocats, aux associations. La solidarité depuis l’extérieur est une arme, ça permet aux prisonniers-ères de tenir le coup. Soyons solidaires avec les prisonniers du batiment 2A de Vincennes, et tou.te.s les autres. Par exemple, en appellant les cabines du CRA pour montrer notre soutien à la lutte, en faisant des parloirs et des parloirs sauvages… voici toutes les infos.
Numéros des cabines de Vincennes 2A :
01 48 93 69 47
01 48 93 69 62
01 48 93 90 42

PS Dimanche dernier, avant un parloir, des personnes de l’Assemblée contre les CRA ont assisté à une tentative d’évasion à Vincennes. Elles racontent ce qui s’est passé :
Vers 16h30, alors qu’on attend depuis pret de deux heures, une alarme retentit. Des flics se mettent à courrir, nous aussi. Un homme saute par dessus un portail qui l’améne à l’extétieur du CRA (côté batiment 1), traverse la route malheureusement face à lui un parking grillagé. Là une quinzaine de flics arrivant de toute part le rattrape sous nos cris et nos yeux impuissant alors qu’il est suspendu au grillage. Ils le transporteront allongé jusqu’à la voiture qui l’emmenera en garde à vu. Il ne se débatait même plus comme si il avait mis tout le reste de son énergie dans cette tentative d’évasion.

LIBERTE POUR TOU.TE.S
SOLIDARITÉ AVEC LES PRISONNIERS-ÈRES EN LUTTE
A BAS LES CRA !

 

Jusqu’au 2 février : Un appel à la mobilisation contre les CRAdepuis l’Italie

Suite aux derniers évènements dans les prisons pour sans-papiers, des camarades en Italie appellent à une semaine d’actions contre les CPR (CRA), pour la libération de toustes les prisonnièrs. Soyons nombreux-ses en France aussi à montrer notre solidarité.

A bas l’enfermement et les frontières, en Italie comme en France et partout ailleurs !

Voici le texte d’appel traduit en italien (d’autres témoignages et infos après l’appel) :

DU 27 JANVIER AU 2 FEVRIER: SEMAINE D’ACTIONS
ET DE MOBILISATIONS POUR LA FERMETURE DE
TOUS LES CPR, POUR LA LIBÉRATION IMMÉDIATE DE TOU.TE.S LES DETENU.E.S ET POUR VAKHTANG

Le 18 Janvier, Vakhtang Enukidze est mort a l’hôpital de Gorizia après avoir été battu à mort par les forces de l’ordre entre les murs du CPR (1) de Gradisca d’Isonzo (Frioul-Vénétie Julienne).
Les détenus nous l’ont rapporté, le 18 janvier au soir, alors que, ayant appris la mort d’une personne, nous nous étions retrouvés devant le CPR pour leur parler. Ils nous l’ont crié par dessus les murs, nous ont appelés et nous ont envoyé des vidéos, avec tout
le courage de ceux qui savent que personne d’autre ne sait ce qui s’est réellement passé au sein du CPR.

La préfecture de police et le ministère public ont tout fait, dès le début, pour minimiser sa mort : « mort d’un migrant lors d’une rixe » titraient les journaux le lendemain de la publication de la nouvelle par Melting Pot (2). Néanmoins, nous somme parvenus à faire entendre la voix des détenus, comme tant d’autres solidaires l’avaient fait avant nous pendant des années. Ainsi de nombreuses personnes dans toute l’Italie ont pu entendre leurs témoignages. Le lendemain, dimanche 19 Janvier, beaucoup d’entre nous sont retournés devant le CPR, tandis que les détenus nous appelaient, fuyant les coups qui – nous disaient-ils – étaient réservés à ceux qui parlaient avec les personnes présentes dehors. Les directives semblaient claires: plus aucune communication avec l’extérieur. La nuit, les gardes ont tenté de saisir tous les téléphones portables, une « récupération » que le ministère public a justifiée « aux fins de l’enquête ».

Cette même nuit, un député et un avocat sont venus visiter le CPR à l’improviste, y trouvant les agents des forces de l’ordre en tenue
antiémeute et les ont entendus parler du sang présent dans l’établissement. La presse a alors commencé à rapporter la version des camarades de Vakhtang: battu à mort par la police, un nouveau cas « Cucchi » (3), étranger cette fois, et dans un CPR et non une prison. Le procureur a rapidement déclaré que les éléments de cette version n’était que « des rumeurs ». Le 21 Janvier à 4 heures du matin, les trois compagnons de cellule de Vakhtang, qui faisaient partie de ceux qui s’étaient déclarés prêts à témoigner, ont été déportés en Égypte sans que personne ne le sache. C’est ainsi
que le « ministère public enquête », comme nous le disent les journaux.

Lorsque la version des témoins a filtré, la presse a directement étiqueté l’assemblée qui transmet les voix des détenus comme un groupe d’extrémistes et d’incitateurs à la révolte – comme si les révoltes avaient besoin d’une incitation extérieure -, essayant ainsi de la délégitimer. Dans un même temps, de multiples tentatives de saper la crédibilité des détenus ont été faites. Vakhtang a été décrit comme violent, toxico et automutilateur, description visant à diminuer l’empathie envers lui. Les détenus en général sont décrits comme des violeurs, des trafiquants de drogue et/ou des criminels.

Vakhtang était une personne vivante, avec ses propres rêves, enfermée dans un enfer carceral créé par des lois racistes. Dans tous les CPR italiens se trouvent des détenus enfermés dans des camps du simple fait de ne pas avoir de documents en règle.Leur emprisonnement ne se termine pas toujours par une expulsion, les détenus etant souvent libérées avec un « foglio di via » (4) qui les oblige à vivre dans la clandestinité.

Les personnes déportées, en revanche, se retrouvent contraintes de rentrer dans leur pays d’origine sans possibilité de revenir en Italie, où certains ont toute leur vie et leur famille, ainsi ramenées au point de départ d’un terrifiant voyage déjà affronté au moins une fois. La menace d’expulsion est la plus grande qu’une personne non
européenne puisse recevoir: le CPR, théâtre d’abus et encore pire que la prison, sert à rendre cette menace réelle. Elle contraint les gens a accepter des conditions de travail inhumaines, afin de maintenir un emploi, sésame en vue d’une carte de séjour.

La loi suivra son cours et peut-être qu’un jour quelqu’un sera jugé coupable. Mais il nous appartient maintenant de ne pas laisser le meurtre de Vakhtang passer inaperçu et de faire tout notre possible pour que tous les CPR soient définitivement fermés. Encouragé.e.s par la réponse de solidarité reçue de toute l’Italie, nous lançons un appel à une semaine d’actions et de mobilisations en vue de la fermeture de tous les CPR, pour la libération immédiate des personnes qui y sont enfermées et pour Vakhtang.

Nous invitons donc tous les individus, assemblées, groupes, associations, organisations, comités à faire tout leur possible pour atteindre cet objectif. Convaincus que chacun peut exprimer sa colère et sa dissidence comme il l’entend, nous pensons qu’est venu le moment d’agir. Que chacun.e s’organise la où il vit. Faisons en sorte que ces lieux infernaux ferment.

 

Si vous souhaitez nous informer des initiatives ou des actions a venir, vous pouvez nous
écrire (italien, espagnol, anglais, français, etc.) à: nocprnofrontieretrieste@riseup.net

 

(1) les CPR, Centri di Permanenza per i Rimpatri, ou Centres de rétention pour les
rapatriements en Francais, sont l’équivalent italien des CRA (Centres de Rétention
Administratif) dans lesquels la détention est possible jusqu’a une durée de 6 mois.
(2) https://www.meltingpot.org/
(3) Stefano Cucchi est un jeune Italien battu à mort par la police alors qu’il était en
détention provisoire à Rome le 22 Octobre 2009.
(4) Interdiction du territoire d’une commune, par exemple.

 

no cpr e no frontiere. né in fvg né altrove. libertà!

Vidéo d’une intervention de la police au sein du CPR.
Link1: http://nofrontierefvg.noblogs.org/files/2020/01/WhatsApp-Video-2020-01-18-at-
18.40.35.mp4?_=1
Link2: https://www.facebook.com/nocprfvg/videos/478605026408512/

Témoignage (en Italien) d’un détenu sur les faits qui menèrent à la mort de VakhtangLink: https://nofrontierefvg.noblogs.org/post/2020/01/19/testimonianze-sappiamo-chi-
e-stato/

Plus d’infos: Assemblea No CPR no Frontiere Friuli-Venezia Giulia
https://nofrontierefvg.noblogs.org/
https://www.facebook.com/nocprfvg/

S’opposer aux déportations : résistances quotidiennes au CRA de Vincennes

On le répète souvent : les résistances dans les prisons pour sans-papiers sont quotidiennes, tout comme les violences des keufs et la repression. Un copain du CRA de Vincennes a appelé pendant l’émission de l’Envolée du 19 décembre pour raconter quelques épisodes qui ont eu lieu il y a trois semaines : un séjour en garde-à-vous à cause du refus de voir un consul (c’est le consul qui signe les laissez-passer grace auxquels les prisonniers-ères sont expulsé.e.s) ; une « nuit blanche » où des prisonniers solidaires ont tenté d’empecher des expulsions ; un groupe de prisonniers qui déchire sa carte du CRA en signe de protestation…

Voici la retranscription de la discussion durant l’émission qui est disponible plus bas :

-Bonjour. (intervenant)

-Salut. (animatrice)

-Je suis au CRA de Vincennes, à Paris. J’ai parlé avec des gens m’ont proposés de parler avec vous.  Seulement pour raconter un peu de mon histoire et tout ce que j’ai remarqué dès le moment où j’étais prisonnier dans ce centre-là. (intervenant)

-Çà fait trente jours que tu es dans le CRA ?  (animateur)

-Oui c’est ça monsieur, ça fait un mois que je suis là.  (intervenant)

-Et dernièrement ils ont voulus te faire voir le consul,  peut-être que tu voulais raconter d’autres trucs avant ? (animateur)

-Voilà, c’était la première fois que l’on m’a appelé pour voir le consul. J’ai accepté mais la police s’est trompée et ils ne m’ont pas ramenés à l’ambassade de mon pays d’origine. Voilà, j’ai accepté de passer à l’ambassade de mon pays d’origine. Avec la police pas de problème jusqu’à ce qu’on soient entrés dans l’ambassade de mon pays d’origine. J’étais devant le consul, qui m’a montré le dossier que la préfecture lui avait transmis. Il m’a montré tout le dossier et à l’intérieur il y a quelque chose qui m’a choqué.
Après ça j’ai décidé de refuser tout les rendez-vous (consulaires) que l’on pourrait me proposer après. Pourquoi ? Je vais te dire pourquoi. J’ai remarqué que dans ce dossier il était écrit que j’avais déposé une
demande d’asile (en France). Depuis ma demande d’asile ça fait presque deux ans que je vis en France.
Au bout de deux ans on a refusé ma demande. J’ai déposé un recours pour ma demande mais je n’ai pas reçus de convocation avant D’être arrêté à Paris. J’ai été placé en garde-à-vue au commissariat. Dans le
commissariat on me dit : « vous avez une OQTF  monsieur ». Je leur ait répondu que non je n’avais pas d’OQTF. Après j’ai été transféré au centre, ça va, la nourriture n’est pas bonne mais c’est pas grave. Au
vingt-huitième jour on m’a programmé une visite à l’ambassade. Mais je savais que nous les demandeurs d’asile avons le droit, même si l’État refuse notre demande d’asile ici en France, qu’au moins il ne révèle pas à notre pays d’origine que l’on a demandés l’asile. Ca risquerai de créer des problèmes si jamais on retourne chez nous.

Si on rentre chez nous automatiquement il y aura un contrôle à l’aéroport de notre pays d’origine et on nous demandera pourquoi on a déposé une demande  d’asile, pourquoi on est pas bien dans notre pays. Vous imaginez comment ça se passe dans les pays en Afrique en général.

C’est pas comme en Europe. Vous le savez et tout le monde sait ça. On va vous dire que vous êtes contre votre État, que vous êtes contre votre gouvernement, on va te créer des problèmes si toi tu n’as participé à rien. Quand votre état d’origine sait que vous êtes un
demandeur d’asile dans un État étranger ça va vous créer beaucoup de problèmes. (intervenant)

-Et là tu as vu qu’en fait cette demande d’asile dans le  dossier du consulat ? (animateur)

-Oui tout à fait mon ami. La troisième fois j’ai refusé d’aller au consulat, alors ils m’ont placés en garde-à-vue. Je suis passé devant un tribunal pour cette affaire là, ils m’ont fait lire un papier comme quoi
je risquai trois ans de prison parce que j’ai refusé de d’aller à l’ambassade. Ça n’est pas normal de faire trois ans de prison parce que tu as refusé de voir le consul. J’ai trouvé que c’était bizarre. Ils ont d’autres manières de connaître mon identité, ils n’ont pas besoin de m’amener à l’ambassade. (intervenant)

-Parce qu’en fait ce qu’il faut rappeler c’est que quand l’état français décide d’expulser des gens il faut qu’il y ait un accord de la part du pays dans lequel les personnes sont renvoyées. C’est pour ça qu’il y a
besoin de faire toutes ces démarches auprès du consulat. (animateur)

-Dès le moment ou je suis au commissariat, automatiquement ils ont mes papiers, mes empruntes, ils ont toutes les preuves (de mon identité). Ils ont mon adresse, mon dossier de demande d’asile. Ils ont beaucoup de preuves et n’ont pas besoin de passer par l’ambassade. Même s’ils ont le droit de m’amener à l’ambassade, au moins qu’ils ne mettent pas dans le dossier comme quoi je suis un demandeur d’asile. Et comme ils ont refusé ma demande ils n’ont pas à prévenir mon pays d’origine. Au moins. On est venus en France parce qu’on est déjà en danger. Peut importe quel danger, mais en plus ils vont nous causer de gros problèmes. Au moins qu’ils ne nous mettent pas en danger en disant : « ce monsieur il n’a pas de papiers, il n’a pas le droit de rester, c’est pour ça qu’il faut qu’il quitte la France ». Ça va, on peut rentrer tranquillement selon eux mais on ne peut pas imaginer les problèmes qu’on va rencontrer en rentrant. (intervenant)

-Ça ne justifie pas que l’on renvoi qui que ce soit mais bien sur c’est encore pire de renvoyer quelqu’un dans ces conditions. Alors que tu te protégeais en allant pas au consulat, les keuf te foutent en garde à vue ! (animatrice)

-Après la garde à vue ils m’ont amenés au tribunal de Clichy et après devant le juge. Il m’a dit : « pourquoi vous avez refusé d’aller au consulat ? Vous ne voulez pas partir ? ». J’ai répondu que non je ne voulais pas partir. J’ai des problèmes et en même temps la  préfecture de police de Paris va encore me rajouter des problème. J’ai dit que le jour où j’ai demandé l’asile à l’OFPRA, la préfecture m’a donné une brochure avec mes devoirs et mes droits. Dans mes droits il y est écrit que si ma demande est rejetée mon état d’origine ne saura aucun détail. La demande reste secrète. C’est entre moi et l’état français, mon état d’origine ne doit pas le savoir. Le juge m’a relaxé, il a reconnu que j’avais des raisons sérieuses de ne pas vouloir me rendre au consulat. (intervenant)

-Ça ne va pas solutionner le problème parce que tu es toujours en CRA. (animatrice)

-Je suis retourné au CRA mais je vous dirai une chose aussi. Ils font des trucs bizarres avec nous. Le jour ou je devais passer devant le juge des libertés c’était le quatre décembre. C’est à dire le jour où ils m’ont placés en garde-à-vue. C’est comme ça que j’ai perdu mon droit à passer devant le juge des libertés. (intervenant)

-Et comme ça tu es obligé de refaire trente jours.  (animatrice)

-Je suis obligé de passer encore trente jours là avant  de voir le juge et pendant ce temps là il peut se passer  beaucoup de choses. Ils ont volés mon droit à passer  devant le juge et avec un peu de chance être libéré, je  ne sais pas mais il faut laisser leur chance aux gens.  C’est un droit.
Le soir ou je suis rentré du tribunal j’ai trouvé un jugement comme quoi j’avais trente jours de plus pour absence. Le juge m’a condamné parce que j’étais  absent puisque à ce moment là j’étais en garde-à-vue.(intervenant)

-Tu ne peux pas faire appel sur ça ? (animateur)

-J’ai fait appel mais ils ont refusés. (intervenant)

-Ils ont refusés alors que tu n’as pas pu te défendre et te justifier. (animateur)

-C’est écœurant de voir ça. (animatrice)

-Et ça n’est pas seulement mon histoire. Il y a plusieurs histoires de ce genre là. Les détails changent mais comment dire, a gauche à droite on entends es gens qui ne connaissent pas bien leurs droits et ils (la police et la préfecture) en profitent pour jouer comme ils le veulent. Ils te font perdre ton temps, ils rejettent tes appels, il y a trop de qui n’est pas prise en compte. (intervenant)

-En plus à Vincennes en ce moment il y a  particulièrement d’actions. Il y a eu des tentatives d’évasion non ? (animateur)

-Oui plusieurs fois. Depuis que je suis dans le CRA, plus de quatre fois. Il y a des gens qui ont cassés le plafond pour sortir. Qui ont cassés des fenêtres pour sortir, les toilettes aussi. Ils ont enlevés les toilettes pour descendre en bas. Mais chaque fois ils se font
arrêtés et ils n’arrivent pas à sortir. (intervenant)

-Il y a eu de la répression après ? (animateur)

-Oui de la garde-à-vue, des garde-à-vue de 48H directe. (intervenant)

-Ils sont jugés directement après ? (animateur)

-Non, non, ils sont transférés dans un autre CRA mais on reste en contact avec eux. Ils restent simplement en garde-à-vue 48H sans rien ajouter à leur casier. Souvent ils font leur garde-à-vue dans une chambre, seuls, à l’intérieur du centre. (intervenant)

-Mais non ?! Ca n’est pas du tout légal. Normalement les locaux de garde-à-vue c’est des locaux bien  spécifiques déterminés par la loi. C’est pas possible. Putain c’est de la folie. (animateur)

-Mais dans le centre de rétention ?! (animatrice)

-C’est pas un problème pour eux monsieur, ils savent qu’on a pas de preuves. Ils cachent tout. Il y a des endroits où il n’y a pas de caméras. Mon ami qui est à coté me dit que c’est pire que la police de chez nous. (intervenant)

-On a de la souffrance ici, on a de la souffrance, camarades. (deuxième intervenant)

-On imagine. On m’a dit que collectivement vous aviez faits des actions pour éviter la déportation d’un de vos potes. (animateur)

-Oui oui on a fait une nuit blanche, on étaient d’accords. Presque une centaine de personnes ici. On était rassemblés dans la cour du centre. Personne ne devait dormir. On a discutés. Après ils ont fait rentrés plus de policiers. Ils ont ramenés 20 policiers, ils ont menacés de nous ont gazés pour nous ont renvoyer dans nos chambres. On a pas bougés. (intervenant)

-Quand vous avez refusés de bouger, qu’est-ce qui c’est passé ? (animateur)

-On a parlés au commandant, il a essayé de nous calmer mais nous on voulaient pas dormir. On reste ici debout. On ne veut pas dormir c’est notre droit. Il a dit : « quand je vais chercher quelqu’un je vais le chercher, je m’en fous de vous. J’ai l’expérience de ça, je peux prendre qui je veux, vous ne pouvez pas m’empêcher de prendre l’un d’entre vous ». Ils ont essayés de nous faire peur mais on a pas bougés. D’abord ils ont seulement sortis leurs gazeuses pour nous effrayer. On est restés solides jusqu’à six heures du matin.  Malheureusement ça n’a pas marché, ils auraient pu êtres plus violents. (intervenant)

-J’ai entendu que d’autres avaient déchirés leurs cartes. (animateur)

-Oui c’est au même moment. La même nuit ou l’on a fait la nuit blanche. Plusieurs personnes ont déchirés leur carte, ils ont dit : « on est déjà sans-papiers alors ça ne change rien ». (intervenant)

-Vous avez raison. Franchement c’est hyper classe toute la solidarité que vous venez de faire avec votre pote. Ça n’a pas marché parce que de toute façon ils sont plus forts mais c’est important de résister de cette manière. (animateur)

-Ce qui est sur c’est que ce problème là , ça ne va jamais se finir. Les gens, même si on les renvois dans leur pays d’origine, au bout d’un moi, deux mois ils vont retourner en France. Le problème c’est que lorsqu’ils reviennent de cette façon là, après ils ne reviennent pas avec de l’amour pour la France. Même s’ils avaient essayés de mener une vie sérieuse, ça change le caractère avec le stress. On quitte notre pays, on imagine que la France c’est un pays bien, un pays de droit, de sécurité, c’est ça qu’on imagine. Mais quand on vient ici, à la fin c’est le contraire. (intervenant)

-Est-ce que ton poto à coté veut parler ? (animateur)

-Je veux remercier pour votre aide à retransmettre  notre parole, ça nous donne du courage, je vous passe mon ami. (intervenant)

-Bonsoir. (deuxième intervenant)

-Bonsoir. (animateur)-Salut. (animatrice)

-Je suis en France depuis onze ans. J’ai fait mes études ici, je suis quelqu’un de bien, j’ai un casier judiciaire vierge. (deuxième intervenant )

-Après on sans fout, même avec un casier tu devrais avoir le droit de vivre ici. (animateur)

-J’ai trouvé beaucoup de problèmes ici. On nous traite comme des groupes de voyous, vraiment dans notre France. Nous sommes ici pour construire notre vie. Je suis avec des voleur ici, avec la police, j’ai pas compris. (deuxième intervenant)

-Oui ben moi aussi je vole, j’ai volé mais ne t’inquiètes pas c’est pas contagieux. (animatrice)

-Ce qui est sur c’est que la promiscuité dans les CRA ça ne simplifie rien. Tu te retrouves à vivre avec des gens que tu n’as pas choisis mais ça ne veut pas dire que c’est parce-qu’ils sont voleurs que tu ne
t’entends pas bien avec eux. (animateur)

-Ici on ne peut pas dormir plus de deux heures trois heures. On ne peut pas fermer la porte et chaque nuit ils nous contrôlent. Chaque fois, chaque fois, chaque fois. (deuxième intervenant)

-Ils utilisent des pratiques qui vous fatiguent moralement, physiquement pour le jour J de l’expulsion. (animatrice)

-Oui c’est pour ça. Et quand tu passes devant le juge  des libertés ta demande est déjà rejetée avant que tu ne sois arrivé. (deuxième intervenant)

-On va devoir passer à autre chose mais continuez à rester solidaires comme vous le faites à l’intérieur. Ne vous opposez pas entre vous soi-disant entre les gentils et les méchants, les voleurs, les pas
voleurs. (animateur)

-C’est ce qu’ils cherchent au final quand même les keufs, à vous diviser. (animatrice)

-Le mieux c’est que vous restiez solidaires entre vous et que vous vous battiez. Plein de force, plein de courage, n’hésitez pas si vous voulez rappeler la semaine prochaine. (animateur)

-Merci vous êtes très gentils. Au-revoir ! (deuxième intervenant)

Voici son témoignage à écouter (à partir de la minute 38) :

EMISSION DU 6 DECEMBRE 2019