« J’ai dis c’est toujours comme ça que vous ramener les gens ? Ils m’ont dit c’est leur travail… j’ai dit non c’est vous qui faites ça vous même ! » Récit d’expulsion violente sans test PCR vers la Guinée

Témoignage audio retranscrit d'une personne expulsée en Guinée (post coup d'Etat) à l'avant dernier jour de période de rétention vers la Guinée. Encore un récit d'expulsion violente sans test PCR réalisée avec la complicité de Air France.
Témoignage pris par téléphone depuis la Guinée ce qui explique la qualité de l'enregistrement et donc les coupures dans la retranscription écrite.
L'audio a été initialement diffusé lors de l'émission de radio de l'Envolée* du 4 décembre 2021.
[*L’Envolée est une émission pour en finir avec toutes les prisons. Elle donne la parole aux prisonniers, prisonnières et leurs proches & entretient un dialogue entre l’intérieur et l’extérieur des prisons.]

Du coup je commence : d’abord je suis venu en France j’avais 15 ans et tout, et puis voilà j’ai fait ma formation, et du coup on m’a attrapé parce que j’avais pas de papier, à cause d’un contrôle, on m’a ramené à Mesnil-Amelot pour 3 mois.

J’ai fait là bas en fait 89 jours, du coup presque 3 mois¹. Ils sont venus me chercher. Ils m’ont dit que je dois aller avec eux j’ai dis j’ai déjà fini mes trois mois vous m’avez pas prolongé normalement je devrais sortir. Ils m’ont dit non non non, j’ai dis j’ai même pas fait de test… Ils m’ont dit la guinée n’a pas besoin de test.

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Evasion collective et répression au CRA de Mesnil Amelot : des témoignages de retenus

Dans la nuit entre mercredi 28 et jeudi 29 juillet, plusieurs prisonniers du CRA de Mesnil Amelot ont tenté de s’évader, alors que d’autres affrontez les keufs et montaient sur les toits des batiments du centre. Au moins 2 personnes sont arrivées à s’évader !

Il parait que l’action a été bien coordonnée entre les retenus de plusieurs batiments du CRA 2 et du CRA 3, au point que les flics de la PAF ont paniqué et ont appelé des renforts de la BAC et des CRS. Vers une heure du matin, presque deux heures après le début de l’action, les keufs sont malheureseument arrivés à mater la révolte à coups de lacrymos, grenades de désencerclement et matraques. Mais ils n’ont pas pu attraper tous ceux qui s’étaient enfuis : courage aux évadés et à toustes les autres !

Après les tabassages de la nuit, la répression a continué hier (jeudi) matin : fouilles dans tous les batiments, impossible d’avoir un café ou un truc à bouffer, coups de pression. Plusieurs retenus ont été mis en isolement ou transférés dans le batiment des femmes.

Hier soir, ils ont été transférés dans le CRA de Vincennes (3 personnes) et dans le CRA de Palaiseau. Parmi eux, des personnes qui ont été pas mal tabassées pendant la révolte. Certains voulaient porter plainte contre les flics…

Voici le témoignage d’un prisonnier de Mesnil Amelot à propos de la répression qui a suivi la révolte :

« Tu connais le jeu vidéo « Call of duty » ? C’était pareil. J’étais dans une chambre tranquil’ et d’un coup j’ai vu des flics courir dans les couloirs. Ils ont commencé à arroser tout le monde. Flash ball, grenades de désencerclement, lacrymo… ils ont balancé au moins une cinquantaine de projectiles. On a tout ramassé. On a un sac rempli ! Ils tiraient de loin, de derrière les barrières. J’ai un vieux là, il a plus de 50 ans, qui s’est pris un projectile dans la figure. Et quand ils ont fini de nous allumer, alors les CRS et d’autres flics sont intervenus. Ils nous ont forcé à sortir dehors les mains en l’air, tout en nous insultant. Ils ont fouillé les bâtiments, puis les CRS sont restés toute la nuit devant les grilles. Les flics ils ont le sum’ contre nous. Ca les a véner. Pourtant ils ont pris que quelques bouteilles d’eau dans la gueule, c’est pas méchant vu tout ce qu’ils nous ont envoyé. Et c’est rien vu comment on est traité ici. C’est crade, c’est humide, c’est mal aéré, c’est tellement dégueu qu’on tombe malade. Donc c’est normal que la situation soit tendue. »

Copain du CRA2 :

« Hier l’info a tourné qu’une action collective allait avoir lieu, les mecs du CRA 3 se sont préparés, vers les coups de 22h30 ils ont commencé à jeter des draps sur les barbelés et à crier.

Nous on a vu qu’au CRA3 ça commençait donc on a crié aussi. Des gens des deux CRA ont sauté sur le toit, il y avait beaucoup de monde sur le toit.Retour ligne automatique
En bas, on a essayé de bloquer les flics en leur jetant des trucs dessus, en gueulant. 2 mecs ont réussi à sauter de l’autre côté mais les autres ont pas réussi, c’était galère en vrai, au fur et à mesure beaucoup de flics sont venus, les mecs étaient encore sur le toit, les CRS sont venus en renfort, ils ont jeté des lacrymo et des grenades partout pour nous faire fuir. Mais les flics sont pas montés sur le toit juste ils tiraient sur les mecs là haut.Retour ligne automatique
Nous on était nous dans la cour, c’était le bordelRetour ligne automatique
Des renforts sont venus, je pense il y avait au moins 100 flics en tout, ils nous ont alignés et ont contrôlé les cartes de tout le monde, ils se sont rendu compte de qui manquait et que certains étaient partis

Y avait des flics partout, y en a ils étaient dehors d’autres ils étaient dedans, pas mal de gens se sont blessés sur les barbelés, y a un mec qui est tombé du toit, mais il est pas trop blessé et lui ils l’ont attrapé. Retour ligne automatique
Apès je voyais pas tout a cause des gaz, y avait v’la les flics mais on était aveuglés, ça tirait dans tous les sens Retour ligne automatique
Après ils ont tout fouillé, dans chaque cellule, pour chercher les mecs. Certains sont redescendus du toit dans le bloc.Retour ligne automatique
Les CRS sont partis vers 1h. On est tous rentrés dans les cellules.

J’ai vu des gars se faire frapper par des flics, à la matraque. »

  • Y a des gens qui sont partis à l’hopital ?

« Ca je sais pas, aujourd’hui j’ai vu un mec qui boitait, franchement ils ont été tellement violents »

  • Et là aujourd’hui il se passe quoi ?

« Maintenant ils nous font la misère pour se venger. Retour ligne automatique
On peut plus avoir de bouffe en visite, aujd ils ont fermé à 19h. Ils sont venus ce matin pour fouiller et compter les gens Retour ligne automatique
On pouvait pas acheter des trucs les machines étaient bloquées »

  • Vous avez un peu discuté aujourd’hui ?

« Y a des mecs qui sont pas d’accord avec l’action, parce que y en a qui ont rien a perdre, malheureusement on a pas tous la même situation ici. Retour ligne automatique
Franchement c’était chaud, c’était comme un film j’te jure Retour ligne automatique
Ca fait quelques temps que y a bcp de gens qui essayent de s’évader, parce que c’est ghetto ici t’as vu. Ils amènent pleins de nouveaux tous les jours, encore aujourd’hui ils ont ramené des nouveaux. Retour ligne automatique
En vrai c’est normal que ca pète. »

Autre copain du CRA2 :

« Ce qu’il s’est passé c’était le bordel j’te jure comme a dit mon pote. Retour ligne automatique
Après on a du dormir dans les cellules pleines de gaz, y avait des gars qui arrivaient même pas à respirer.

Là aujourd’hui ils nous font trop chier. Ils veulent se venger contre tout le monde pour nous faire payer le prix de la liberté.

Je crois que 7 ou 8 personnes se sont fait attraper, y en a un qui s’est fait salement tabasser à l’isolement, Y avait une voiture qui était garée devant l’isolement et qui le surveillait dans le batiment des femmes. Retour ligne automatique
Ils ont même pas accepté que je lui passe une cigarette t’imagines. C’est pas la solution de les priver encore plus de liberté.

Franchement ici ca va pas, ca devient de pire en pire, chaque fois tu vois des nouveaux visages, des nouveaux systèmes, ils te laissent pas te reposer, même quand on est calmes, dans la cellule, ils viennent nous faire chier, nous fouiller, on est jamais tranquilles ici c’est du harcèlement. Eux même ils font en sorte de te faire péter un plomb, mais ils nous empêchent de nous défendre.

Aujourd’hui ils ont ramené au moins 5 personnes.Retour ligne automatique
Ils en ont mis 3 en isolement. Celui qui s’est fait tabasser j’ai plus de nouvelles, son téléphone est éteint. Retour ligne automatique
On dirait qu’ils ont tourné un film hier, j’te jure si on avait eu des caméras on aurait fait un film.Retour ligne automatique
Les gens qui ont été le plus frappés ils les ont transférés pour leur éviter de porter plainte. »

Copain du CRA3 :

« On a voulu monter en haut, pour demander nos droits, voir nos enfants, demander la liberté, ils nous ont gazés, ils nous ont frappé, mais y a pas de changement.

Ils sont en train de se venger.

Moi je suis allé à l’hopital, ils m’ont filé une ordonnance, mais en arrivant au CRA ils ont refusé de me donnerles médicaments prescrits.Retour ligne automatique
J’ai le diabète, ils veulent pas me donner mon traitement, même en prison j’avais accès à mon traitement la ils m’ont même pas laissé ma machine à insuline.

Y a un gars qui a déposé plainte contre les flics, et ils les ont transférés direct – franchement ils étaient pleins de bleus. Ils ont transféré ceux qui avaient été le plus frappés hier et qui voulaient porter plainte. Ils effacent les traces tu vois. Retour ligne automatique
Mais ici c’est n’importe quoi. Retour ligne automatique
Y a pas de lumière aux toilettes, c’est un truc de fou, on peut même pas acheter d’eau, on boit l’eau du robinet alors que moi j’ai des problèmes de reins, y a rien qui va ici.

Moi je suis en France depuis 40 ans mais je les connais, je me fais pas d’illusions. J’ai déjà été expulsé en 2006, j’avais ma carte de séjour dans la poche. C’était après les émeutes de banlieue, ils arrêtaient tous les noirs et arabes, ils m’ont mis a Vincennes, j’avais ma carte de 10 ans, j’ai fais un recours mais le lendemain ils m’ont mis du scotch et bim dans l’avion. Retour ligne automatique
J’ai toute ma famille ici, je devrais pas être ici, j’ai eu 2 fois des cartes de 10 ans, c’est même pas légal que je sois sans papier maintenant, parce qu’en taule ils m’ont pas laissé renouveler mon titre et maintenant je suis ici.

Mais. Ca va pas se passer comme ca, on va continuer à lutter et faire des manifestations. »

Après la révolte et le gros incendie de janvier 2021, les luttes dans le CRA plus grand de France n’ont pas arretées. En mars, grève de la faim et refus collectif de rentrer dans les cellules. En juin, à l’occasion d’une manif contre les CRA, les prisonniers à l’intérieur répondent avec force et lancent une grève de la fraim. Et encore, les résistances individuelles n’ont jamais arreté et les refus de test pour empecher l’expulsion continuent, malgré la criminalisation et les menaces des flics.

Ces dernières semaines, l’administration du CRA avait commencé à installer des clotures encore plus hautes entre les batiments du centre [un témoignage suivra bientot]. Mais la répression, les violences policières et des murs de plus en plus hauts n’ont pas pu empecher la révolte et l’évasion.

solidarité avec les prisonniers-ères

force aux evadés

a bas les cra !

Violences policières : Deux retenus gazés par un gardien au CRA du Mesnil-Amelot

Jeudi 22 avril deux prisonniers au Centre de rétention administrative du Mesnil-Amelot ont été gazés par un gardien, alors qu’ils s’apprêtaient à rompre le jeûne dans leur cellule.

Nous relayons ici le témoignage de l’un des deux retenus agressés :

« Mon pote et moi étions en train de préparer le dîner dans ma cellule, quand aux alentours de 21 heures, un gardien a frappé très fort à la porte. Il a donné des grands coups contre la porte comme si on était des terroristes!

Quand le gardien est entré dans la cellule, je lui ai demandé pourquoi il s’était mis à tambouriner comme ça contre la porte. Je lui ai dit qu’on allait manger, qu’il n’avait aucune raison d’être énervé. Il m’a répondu : « Je suis policier, je fais ce que je veux. »

Tout en discutant de son attitude, on est sorti de ma cellule pour
l’appel. Puis le gardien a fait deux pas en arrière, a sorti une bombe lacrymogène et a gazé à hauteur de nos visages, sous les yeux de huit autres gardiens. Tout le monde a été choqué, même le personnel, mais personne n’a bougé le petit doigt, personne ne l’a repris.
Ni mon pote ni moi n’avons touché le gardien, nous ne l’avons pas agressé. On n’a rien fait et il s’est mis à nous gazer. Ce n’est pas un policier, c’est un homme raciste.

Vers 23 heures, le chef du centre s’est rendu dans ma cellule pour tenter de justifier l’attitude du gardien. Il m’a dit : « Tu sais c’est un nouveau, il est jeune, il ne sait pas ce qu’il fait ». Comme si c’était normal. Je suis choqué. »