« Ils te scotchent pour te ramener à l’avion, comme une enveloppe. » violences post-incendie au CRA de Vincennes

Au CRA de Vincennes, 1 mois après l’incendie la répression se fait toujours sentir. Les flics agissent toujours main dans la main avec l’infirmerie du CRA pour refuser des soins à des personnes gravement malades. Les flics s’acharnent sur les personnes qu’ils accusent d’etre responsables de l’incendie, violences, vols cachés, fausses plaintes déposées, refus de soins… Voici le témoignage d’un prisonnier enfermé depuis plus de 2 mois.

Refus de soin en CRA

Pour les malades personne ne sort d’ici : même si tu es en état comateux tu vas pas sortir d’ici. Quelqu’un a eu une crise d’estomac, ça fait longtemps qu’il a problème, il a une injection chaque mois ; au milieu de la nuit il a eu une crise, on a appelé un infirmier – je connais pas son nom, on a déposé beaucoup de plainte contre lui. Cet infirmier le voit comme ça, déchiré, au sol, il dit « non c’est pas une urgence, on appelle personne, il n’a rien ».

Un égyptien a une fissure dans l’anus, il souffre beaucoup, il perd du sang ; l’infirmier vient, il le regarde pas. Parle lui, touche le, comment tu peux savoir son état juste d’un coup d’œil de 3 secondes ? il dit « non c’est pas une urgence ». On a appelé les pompiers parce que c’était vraiment grave, ils ont répondu, ils ont dit qu’ils allaient venir ; au milieu de la route ils ont fait demi-tour, on a appelé encore, ils ont dit que l’infirmier avait dit qu’ils pouvaient pas venir. Ils nous ont dit qu’ils ne pouvaient pas rentrer comme ça, le responsable médical leur avait dit que c’était pas la peine, c’était pas urgent. Le matin ils l’ont amené à l’hôpital. Les cas que je te raconte, c’est des cas urgents, ils devraient être à l’hôpital.

Un autre égyptien a été à l’hôpital, ils l’ont emmené et le médecin a enlevé presque un litre d’eau de son corps, de ses parties intimes, il a été hospitalisé 3 jours ; le médecin n’a pas pu le protéger, il a dit « pas question qu’il sorte » mais les policiers du CRA l’ont rapporté de force au CRA, les flics ont déchiré les papiers, le gars les a vu déchirer des feuilles qui lui appartiennent. Après ils l’ont ramené ici, ils ont décidé que son état pouvait lui permettre de voir un juge. Le gars il va mourir et on va le renvoyer.

Répression post incendie et violences policières

Depuis l’incendie, nous on a été accusés de l’incendie. On ne cherche pas les policiers, on est tranquilles dans la chambre, ils viennent fouiller, ils nous fouillent au corps, nous parlent mal, nous insultent direct. Mon copain qui dort avec moi était blessé au genou : ils le manipulent de force, ils l’ont frappé.


bruit d’appel au micro interrompt couvre sa voix


« tu vois ils tapent dans les nerfs, rien que le micro qui s’arrête pas c’est de la torture.

Donc mon copain, ils l’ont trainé jusqu’à l’isolement, ils l’ont frappé. J’ai parlé au gradé parce qu’on était révoltés, moi je parlais fort, je défendais mon ami bien sur car ils le frappent sans raison. Et là le gradé me parle de l’incendie. Un mois après il me parle de ça il me dit « j’ai perdu 150 000€ » je sais pas quoi, je lui ai dit « va voir la vidéo tu vas tout comprendre, tu vas voir que nous et mon copain on avait rien fait » il y est allé puis après il a dit « c’est normal, il le mérite » , « ils méritent ce traitement, c’est à cause de leur comportement ». Mais moi j’étais témoin leur comportement il était plus que normal, ils parlaient les mains derrière le dos. On évite les policiers ces derniers temps. Maintenant tous les gens accusés de l’incendie ils ont tous été renvoyés au bled, tous en vol caché : les policiers débarquent la nuit, même pas t’as 2 minutes, « prends tes affaires t’as un vol ». Des fois ils ont pas de laisser passer ils prennent les gens quand même. Il y a des faux laisser passer, ils prennent des gens comme ça avec des laisser passer faux. Ils te scotchent pour te ramener à l’avion, comme un paquet, même pas comme un animal, comme une enveloppe.

Flics voleurs

Lorsqu’on a été accusés de l’incendie, ils nous ont ramené en garde à vue pour 36h, après on a été libérés, on est revenu ici. Un ami à moi avait 2 téléphones dans le coffre : quand il est parti en garde à vue, les téléphones étaient dans le coffre. Quand on est revenu, ils nous ont fait des nouvelles feuilles de coffre, en repartant de zéro comme si on venait d’arriver. Lui n’a pas retrouvé ses deux téléphones. Il a les preuves il a l’ancienne feuille de coffre, donc ils peuvent rien dire. Il a déposé plainte à la police des polices, il a raconté tout ; les gradés ici ils l’ont menacé. Ils lui ont dit indirectement qu’il ferme sa bouche, ou bien ils vont lui coller l’incendie dans son dos, s’il parle à nouveau des téléphones.

« Papiers ou sans papiers, je dois vivre. » Témoignage d’un prisonnier du CRA du Mesnil Amelot

Nous retranscrivons ici le témoignage d’un prisonnier du Mesnil Amelot :

La première fois c’était en 2013, à Paris au Mesnil Amelot. J’ai été libéré après 2 jours, 48 heures, quand je suis passé devant le jld j’ai donné toute mes preuves, une adresse fixe et mes démarches d’asile, qui n’a pas abouti. En 2014 je suis fini à Metz, j’ai 45 jours là bas, après pour la déportation j’ai été transféré à Plaisir et puis à l’aéroport. Ils te mettent dans des boxes… Ils m’ont scotché et ramené dans l’avion, les passagers disaient « on peut partir avec lui » mais les flics les ont menacés, ils m’ont torturé. J’ai été renvoyé chez moi au Cameroun. Je suis revenu en 2017 en situation irrégulière. En octobre 2018 j’ai été contrôlé et j’ai été amené en CRA malgré le fait que j’étais pacsé. J’ai été un des derniers à « profiter » de 45 jours, en décembre j’ai été libéré. En décembre 2019 à nouveau un contrôle, on m’a amené au CRA de Palaiseau et j’ai été libéré au bout de deux jours, j’étais marié. Mais en janvier dernier, après un contrôle on me remet une convocation soi-disant pour vérifier mon titre de séjour, parce qu’il y avait pas assez de pièces… Là ils m’ont retenu et amené au CRA, ici à Mesnil. Au bout d’un mois et 8 jours ils m’ont programmé un vol, bien que je sois marié avec une française. Ils disent que c’est à cause du fait que mon passeport est périmé, alors que ma carte d’identité est valide. J’ai un récépissé des démarches de renouvèlement de mon passeport, mais le consul a quand même donné un laissez-passer. J’ai fait appel deux fois, j’ai un vol programmé le 28 février. Je suis fatigué, je veux rentrer au bled et trouver une solution, revenir. Ma femme me soutient mais c’est dur, depuis 2014 comme ça…

J’ai eu une interdiction du territoire e un OQTF. L’avocat a fait retirer l’interdiction mais je dois respecter l’OQTF. Chez moi ça va être dur le retour, les ambassades sont dures au bled, mais je préfère avoir ma liberté dans mon pays que rester enfermé dans des conditions si mauvaises. Au tribunal il y avait la grève des avocats, deux fois j’ai pas eu d’avocat j’ai dû me défendre tout seul. Au premier tribunal, au deuxième prolongement, à la cour d’appel, jamais il y a eu d’avocat. Tu sais, y a des juges qui sont pas cléments, ils regardent pas la réalité, ils essaient même pas de faire leur travail, ils essaient juste de te faire condamner.
Normalement j’ai tout, j’ai tout ce qu’il faut, après l’état doit faire ce qu’il a à faire. Papiers ou sans papiers, je dois vivre. Tu peux pas vivre en France sans que la police te contrôle. Tu te dis « essaie, essaie, même s’il faut rentrer chez toi ». Je suis trop épuisé. Parfois tu penses que ça sert à rien, pour moi ça fait dix ans, onze ans même, depuis 2009 j’ai quitté mon pays. En dix ans t’as pas de visa, pas de titre de séjour, pose toi des questions, au bout de onze ans tu te dis faut faire le plus difficile. La préfecture ils doivent faire les choses dans la logique, regarder les dossiers de gens, voir les démarches qu’ils ont fait. Ils nous rendent fous, tu vois c’est pour ça dans les foyers y a des gens qui finissent en psychiatrie, on les traite comme des fous. J’ai la patience moi, je sais que ça va aller.

Ici ils nous provoquent. A la fouille par exemple, tu vois elle est programmée, je devais envoyer un mail, j’ai demandé aux flics et ils ont récupéré mon téléphone, on peut pas avoir de smartphones ici. J’ai filmé le document pour l’envoyer, le réseau a déconné, il déconne souvent ici, ça partait pas. Le flic m’a dit « c’est fini » alors que ça faisait même pas dix minutes. Directe il a mis ses gants pour me brutaliser, je lui ai dit « pourquoi, ça sert à rien, je t’ai pas cherché », l’autre collègue il est venu me calmer, je lui ai dit qu’il allait me brutaliser. Y a d’autres ils sont humains, y a d’autres ils nous traitent comme de la merde, ils veulent pas savoir. Je cherche pas d’ennui, ça sert à rien. Mais bon, c’est la vie. Toi tu vas avoir le dernier mot et je sais ça. Il y a des gars qui se bagarrent, mais je comprends tu vois, tu pètes un cable. C’est trop. En 2018 j’ai dit c’est la dernière fois, mais comme le statut n’a pas changé, je suis à nouveau ici.

A bas les CRA !

Une nouvelle évasion à Oissel ce week-end !

Encore une nouvelle évasion hier matin à Oissel: vers 11h un prisonnier à réussi à passer par la promenade et à se tirer ! C’est la troisième en une semaine: un prisonnier avait profité d’un feu de cellule pour se barrer le week end dernier, puis un autre a réussi à se casser de l’hôpital. Beaucoup de force à lui (et eux) on espère qu’il est déjà loin !
Juste après les keufs foutent la pression aux prisonniers et refusent de servir direct le repas. Tout ça se rajoute aux tensions déjà présente ces dernières semaines: depuis le 22 janvier des prisonniers luttent face aux violences policières et la collaboration de France terre d’asile (l’asso présente dans le CRA). On relaye ici un témoignage d’un prisonnier qui raconte l’ambiance juste après l’évasion.
Pour rappel pour appeler directement les prisonniers, comme dans la majorité des CRA y a des cabines où ils peuvent répondre directement. Pour Oissel côté homme:  02 35 68 61 56 / 77 09
 
 
 
En ce moment tout le monde est entrain de se gratter parce qu’y a un gars qui est rentré avec la gale. J’ai demandé le médecin pour qu’on ait des médicaments on m’ a dit y a pas.
Y en a un autre qui s’est évadé ce matin vers 11h-11h30 et ils nous ont pas donné à manger jusqu’à 14h. Ca fait trois jours qu’ils font pas de ménage, quand on a demandé au policier ils nous disent que c’est par rapport au coronavirus. Ils ont pas peur d’eux, mais il s’en foutent de nous clairement.
C’est pas notre problème si le gars s’est évadé. C’est leurs problèmes.
Y a des gens qui vont se suicider, y a un mec ca fait quatre jours il a pas mangé. Y en a qui avalent des trucs en métals, d’autres du shampoing. C’est chaud.
Y a pas de droit de l’homme ici a l’intérieur, y a pas. 
Des que tu demandes un truc on te repond demain demain. On se fout de toi quoi.
Le truc pour allumer la cigarette il marche pas, donc quand on tape sur la porte pour avoir un briquet ils nous font galerer pendant 20 minutes. Alors qu’à la caméra ils voient bien qu’on galère et qu’on tape.
Y a des insultes et des provocations tout le temps ici.
C’est un truc de ouf ce qui se passe ici. Déjà dans une cellule y a pas la porte des toilettes donc c’est pas possible d’être ici. Vous voyez  qu’y a pas de droit de l’homme y a rien du tout. »
 
Solidarité avec tou.tes les prisonniè.re.s !
Pour rappel pour s’organiser en IDF, assemblée contre les cra: Rdv tous les mercredi à 18h au 21 ter rue voltaire (CICP), métro rue des boulets (l9).