« Un chien, on l’enferme chez vous pendant 48h, il va tout faire, même il va se suicider » : Compte rendu du procès des quatre évadés du CRA de Lyon

 

« Un chien, on l’enferme chez vous pendant 48h, il va tout faire, même il va se suicider » : Compte rendu du procès des quatre évadés du CRA

Le samedi 13 avril avait eu lieu une tentative d’évasion du CRA. Les flics ont interpellé quatre personnes et les ont tabassées, certaines ont dû aller à l’hôpital et ont été mises en garde à vue. Après une première comparution immédiate le 18 avril, le procès a eu lieu le 3 mai, ils ont tous les quatre écopé de 4 mois de prison ferme. Compte rendu d’un procès où un détenu se défend seul.

Résumé de la comparution immédiate du 18 avril :
Une personne ayant refusé d’avoir un avocat et demandé du temps pour préparer sa défense, l’audience a été reportée pour tous au 3 mai. Le 18 avril, il ne s’agissait donc que de décider de leur sort jusqu’au procès. Par formalité, la juge leur demande s’ils ont des problèmes de santé. Une personne répond qu’elle a la maladie de Crohn et a besoin de traitements. Cette information n’a aucune incidence sur la décision finale, les deux seules alternatives étant l’enfermement : le CRA ou la maison d’arrêt. Ils ont été placés en mandat de dépôt à la maison d’arrêt de Villefranche. En entendant cette décision, les détenus, en signe de protestation, sortent d’eux-mêmes du box en lâchant des : « Vive la France ! », « C’est ça la France Madame ?! ».

Compte rendu de l’audience du 3 mai :
Les 4 détenus arrivent dans le box, entourés de 7 keufs, dont 6 y resteront pendant toute la durée de l’audience. Dans la salle, ce sont 3 d’entre eux qui surveillent le public et 1 fait la sécu à l’entrée. Faut dire qu’entre l’audience pour des étrangers ayant tenté de s’enfuir du CRA et celles pour les gardés à vue de la Giletjaunade du 1er mai, l’après-midi verra se succéder les procès politiques. Bien évidemment, les magistrat.es ne manqueront pas de marquer leur mépris…

3 détenus seront assistés par une interprète.

On reproche aux quatre personnes une « tentative de soustraction à une mesure de rétention administrative » le 13 avril et pour deux d’entre elles « la dégradation ayant causé un dommage grave dans le mur du Centre de Rétention, dégradation commise par plusieurs personnes en qualité d’auteur ou de complice »

La juge résume les faits : A 17h45 le 13 avril, l’alarme du CRA se déclenche, deux flics arrivent et voient un trou creusé dans un mur extérieur donnant sur une coursive. Les flics voient trois personnes en train d’escalader et une qui repasse à l’intérieur du CRA. Tous seront interpellées.

La juge montre des photos (vue aérienne et plan du CRA avec matérialisation du trou) aux assesseurs et décrit le dispositif qui barricade le CRA : sur la coursive, il y a des haies avec derrière un grillage de 4m, et le dernier mètre est constitué de panneaux inclinés vers l’intérieur, eux-mêmes terminés par des herses pointues. Pour le trou, les prisonniers se sont servis d’une grille de caniveau pour creuser un mur de 45 cm fait de parpaings, plâtre et moellons. Le trou a été creusé dans le mur d’un local que la juge qualifie de « salle de détente avec une machine à café ». Elle continue sa rubrique TripAdvisor de ce qu’on croirait être un Club Med, et parle d’une « sorte de sas qui permet d’accéder à une cour de détente ». Pour rappel, outre le fait que la machine est hors-service, c’est précisément dans ce local et dans cette cour que les détenus du CRA subissent régulièrement la répression, où ils sont parqués, matraqués et gazés…

La vidéo-surveillance permet aux flics de se repasser toute la scène, qui a commencé vers 13h30. Iels identifient des personnes avec une « responsabilité bien marquée » ; celles-ci vont être poursuivies selon une autre procédure et seront jugées prochainement.

La juge mentionne que les prisonniers ont fait beaucoup de bruit, au prétexte d’encourager un match de foot pour essayer de couvrir le bruit du trou en train d’être creusé.

Les quatre personnes ont reconnu les faits de tentative d’évasion, et la juge ne peut s’empêcher d’ajouter « il était difficile de faire autrement ». Elle interroge ensuite chacun. Elle appuie sur le fait que le PV mentionne que l’un soit « repassé à l’intérieur en voyant la police » et qu’il ait « cassé ». Le détenu se défend de l’erreur de traduction. La juge coupe court : « L’interprète a dit ce que vous lui avez dit, il n’a pas inventé ». Un autre explique qu’il était arrivé depuis 40 minutes au CRA et qu’il n’a rien à voir avec ça.

La juge, s’adressant à D. qui a choisi de se défendre lui-même : « Concernant votre participation aux faits, vous vous êtes blessé en tombant du grillage, vous n’êtes pas parvenu à l’escalader. Vous dites que vous avez entendu parler de l’évasion qui était en projet en début d’après-midi. Vous contestez avoir participé aux dégradations mais vous avez vu le trou se creuser. Vous reconnaissez par contre que vous vous y êtes intéressé, que vous avez fait du bruit, que vous avez donc évidemment participé à cette tentative d’évasion qui a échoué. Alors, qu’est ce que vous souhaitez dire ?

D. : Je voudrais dire que je ne suis pas d’accord, avec l’avocate, pendant la garde à vue on m’a posé des questions.
J : Sur quoi vous n’êtes pas d’accord ?
D. : Je ne suis pas d’accord parce que c’est pas ce que j’ai dit, ce qui est écrit. Moi j’ai pas participé à la dégradation et eux ils ont écrit que j’ai participé à la dégradation. Il y a beaucoup de choses. J’avais une avocate à côté de moi, j’ai demandé, j’ai dit, je n’ai pas dit ce qu’il est écrit, trois fois je l’ai dit à l’avocate. Tout ce qui est écrit c’est pas ce que j’ai dit. J’ai pas eu accès à mon dossier. Jusqu’à aujourd’hui je n’ai pas vu mon dossier. Je sais pas ce qu’on me reproche. J’ai pas eu de réponse. J’ai refusé d’avoir un avocat.
J : Et pourquoi vous avez refusé ?
D. : Parce que j’ai perdu confiance. [Il parle de son PV de garde à vue]. J’ai lu ce qui était écrit trois fois. Je lis j’étais pas d’accord, une deuxième fois je relis j’étais pas d’accord, une troisième fois elle est pas intervenue et puis à un moment donné elle m’a dit « ça commence à bien faire ». Voilà l’avocate ce qu’elle m’a dit. Donc j’ai refusé d’avoir un avocat.

Le juge lit le PV de la garde à vue, sans tenir compte du fait qu’il conteste les propos qui lui sont attribués. Il répond en insistant sur le fait qu’il a vu le trou par hasard, qu’il n’était pas assez grand pour laisser passer quelqu’un à ce moment et qu’il n’a en aucun cas participé aux dégradations. La juge continue à lire le PV qui sous-entend qu’il a participé en couvrant le bruit de la grille.

La personne réussit à reprendre la parole : « Par rapport l’évasion, n’importe qui il a un chien chez lui, qui le ferme pendant 48h, il va tenter de s’évader. L’être vivant, c’est comme ça. Moi je suis un être vivant. J’ai été en prison, de prison on m’a envoyé au centre de rétention, c’est la première fois de ma vie que je suis enfermé. Donc moi je pense et je crois, y a rien qui va changer, je crois profondément que c’est dans mes droits d’essayer de s’évader. Parce que je me sentais pas libre, n’importe qui va chercher sa liberté. Moi j’ai voulu chercher ma liberté, c’est dans les droits de chercher ma liberté [La juge tente de l’interrompre, mais il ne lâche pas]. Mais moi, de mon point de vue personnellement, j’ai pas fait un délit. Je vois pas pourquoi aujourd’hui je suis en prison. J’ai cherché que ma liberté. » La juge l’interrompt, triomphale et dans un rire de dédain : « Et bien précisément, Monsieur, c’est un délit ». Il ne se laisse pas déstabiliser et poursuit : « Un chien, on le met chez vous pendant 48h, il va tout faire, même il va se suicider, il va pas rester enfermé. Moi je suis pareil, je suis un être vivant. Voilà. Y’a des gens qui peuvent être incarcérés, moi je peux pas être incarcéré ». La juge s’impose et, dans un ton condescendant et moralisateur, fait la leçon : « Alors, je vous explique une chose, si vous ne comprenez pas la différence entre un chien et un être humain, le chien ne connait pas la loi et vous vous la connaissez. On en a fini avec les faits, je n’ai pas de question ».

L’audience s’enchaine avec les questions portant sur la personnalité, et insiste lourdement (aidée par le proc’ qui intervient en s’adressant directement aux détenus) sur les casiers judiciaires, les consommations potentielles d’alcool et de drogues. On apprend qu’une personne s’est vue refuser un suivi psychologique et qu’un traitement au Diazépam a été administré à deux détenus. Pour info, une utilisation prolongée de ce médicament peut entrainer un risque de dépendance.

On passe à la situation professionnelle avec cette perle de la juge qui fait réagir la salle : « j’ai juste dit que vous avez travaillé sur des chantiers, j’ai pas dit que vous étiez sans emploi, j’ai dit effectivement que vous êtes sans emploi depuis que vous êtes au centre de rétention ». La juge continue comme si de rien n’était…

Le procureur revient sur la terminologie du mot ’évasion’, qui ne peut pas s’appliquer dans le cas d’un centre de rétention, d’où l’infraction retenue : ’tentative de soustraction en réunion à une mesure de rétention administrative’ : « Mais bon, sociologiquement, ça ressemble quand même beaucoup à une évasion ». Il décrit alors minutieusement comment les prisonniers ont franchi le trou et va même jusqu’à parler de personnes essayant de passer le grillage « avec des cordes de draps noués comme on peut le voir dans les bandes dessinées et dans les films ». Il revient également sur les dégradations en indiquant que tout le monde est complice, les uns creusant, les autres couvrant le bruit.

Il retire le chef d’inculpation de dégradation et retient la tentative de soustraction. Puis il continue son argumentaire sur le cadre légal : « si chacun déterminait à ses yeux ce qui est un délit, une effraction ou un crime, il n’y aurait pas de société. Précisément il y a une loi qui détermine les faits qui sont interdits et les faits qui ne sont pas interdits. Mais en tout état de cause, la loi française prévoit lorsque l’on est dans une mesure de rétention administrative et qu’on cherche à s’évader de cette mesure de rétention administrative, s’y soustraire, c’est un délit, et c’est ce qui justifie ces poursuites ». Il enchaine avec la théorie du bon et du mauvais migrant : « Je tiens compte que ce sont quatre prévenus qui ont tous des antécédents judiciaires, ce ne sont pas des profils de personnes détenues administrativement [il se reprend pour le lapsus], retenues administrativement », « ceux qui cherchent à s’évader ne sont effectivement pas les gens qui sont des citoyens lambdas qui se retrouvent en situation irrégulière ».

Il demande quatre mois d’emprisonnement pour chacun avec maintien en détention.

C’est au tour de l’avocate de la défense, qui représente trois des détenus. Elle commence par le « souci linguistique » : « ils ont été placés en garde à vue pour une ’tentative d’évasion’ qui a été requalifiée en ’tentative de soustraction’ puisque l’évasion doit être pour un détenu de se soustraire à la garde à laquelle il est soumis. Et un détenu c’est quelqu’un qui est soupçonné d’avoir commis une infraction pénale ou qui en a commis une. Et les retenus ne sont pas des détenus, on l’oublie je crois, souvent. On l’a oublié un petit peu dans le cadre de cette procédure et ça pose question puisque, quels que soient leurs antécédents judiciaires, ils sont au Centre de Rétention Administrative car ils sont présents sur le territoire sans autorisation, c’est le seul tort qu’ils ont commis. » Elle explique ensuite ce qu’est un CRA : « C’est un lieu où les gens sont privés de liberté mais sans avoir commis la moindre infraction pénale. Un lieu dans lequel ils doivent rester le temps nécessaire à leur reconduite et dont on sait très bien que chaque année des dizaines de milliers de personnes passent au CRA et sont enfermées pour une durée maximale de 90 jours pour certains avec des enfants en bas âge. » Elle cite ensuite le rapport de la Contrôleure Générale des Lieux de Privation de Liberté publié le mois dernier, dont elle qualifie le passage sur les CRA d’« absolument affligeant » : ‘conditions de rétention insatisfaisantes, personnel insuffisant, conditions matérielles d’hébergement déplorables, locaux vétustes, exigus, mal entretenus, sales, accès aux soins insatisfaisant, agents non formés à la gestion de ces publics, utilisation systématique des menottes pour tout déplacement’. « On comprend mieux à la lecture de ce rapport que l’on puisse confondre soustraction et évasion, même si ces personnes-là ne sont pas détenues, ils en ont tout l’air. C’est un peu le Canada Dry de la détention le CRA, et ça pose au niveau des libertés fondamentales plein de questions ».

Elle rappelle ensuite le contexte : il y a un local de surveillance avec 9 écrans et 90 caméras, « le CRA est quadrillé », il y a actuellement 91 détenus, soit 1 caméra par détenu ! Et il y a même tellement de caméras que les flics finissent par en découvrir une ! Au début, ils pensent qu’aucune caméra n’a vue sur la zone du trou, et c’est d’ailleurs ce qu’indique les PV de 8h45 et de 10h. Et à 14h, ils découvrent la caméra qui a filmé l’entrée du sas menant vers le trou ! Au moment de la tentative, 23 membres du personnel sont présents dans le CRA, dont 19 attribués à la garde. [A ce moment-là, la juge se passe un coup de Labello…]. L’avocate s’étonne que personne ne les ait vus et ne les ait arrêtés dans un contexte de surveillance aussi resserré.

C’est au tour de la personne sans avocat d’assurer sa défense :

« J’ai demandé le 18 pour que je prépare ma défense. En prison, on m’a pas fourni le dossier pour relire la police ils ont dit, les faits qu’ils ont dit sur moi.
Pendant les interrogatoires, ils ont dit que j’étais en train de dégrader le trou, moi je tiens préciser à cette heure-là que le trou il était déjà fait. Pendant qu’on me voit dans la vidéo, j’étais en train de regarder, le trou il était déjà fait. Par rapport à M. H., lui la police il dit, je peux témoigner, vraiment il a rien fait, il a pas fait, ça je peux le témoigner pour M. H.. Par rapport à la loi française, par rapport après on a parlé pour dégradations, j’ai aucun lien avec les dégradations, je veux bien qu’on me le prouve, je veux bien qu’on me le montre la vidéo ou quelque chose, parce que j’ai pas pu monter le dossier. J’ai demandé en prison, 3 fois. Pendant 14 jours j’ai fait 3 demandes. Donc ça c’est par rapport aux dégradations. Mais par rapport à la tentative d’évasion. La tentative d’évasion, c’est vrai la loi française elle interdit ça. Mais moi comme être humain, aujourd’hui, même si on me met en prison, je trouve n’importe quel moyen de s’évader, je vais chercher ma liberté. Je suis un être humain, je suis un être vivant, moi j’ai frappé personne, j’ai fait de mal à personne, j’ai touché personne, j’ai juste cherché ma liberté. Y’a 100 ans de là, y’avait l’histoire de l’être humain, y’a que 100 ans qu’il y a les frontières, y’a 100 ans, juste 100 ans que y’a les frontières. Peut-être ça changera un jour. Je vais être jugé par ces lois-là, moi pour moi, c’est un procès politique déguisé dans une enveloppe de jugement d’affaires je sais pas comment dire. Pour moi, c’est injuste si je suis aujourd’hui en prison, parce que juste j’ai tenté de m’évader. Pourquoi j’ai tenté de m’évader. On m’a donné au centre de rétention de l’Ibuprofène, moi j’ai la maladie de Crohn, on m’a donné de l’Ibuprofène, mais j’ai pas pu vous donner d’ordonnance médicale qu’on me l’a prescrit, c’est dangereux pour ma santé. Une fois j’ai consulté un docteur, il m’a donné des antibiotiques pour ça.
Au centre de rétention, j’étais pas, je me sentais pas un être humain. Je me sentais… tout à l’heure j’ai dit un chien, un chien c’est un être vivant, pour moi il a total respect, pour moi n’importe quel être vivant, il doit avoir le respect. Aujourd’hui, moi je me trouve en prison, je trouve ça injuste, ça c’est mon point de vue personnel bien sûr, je trouve ça injuste que je, honteux aussi que je me trouve en prison à cause de ça. Dégradations, je veux bien qu’on me le prouve. Moi j’ai pas dégradé, j’ai rien fait ou quoi. J’ai pas pu préparer ma défense, Madame. Ça je sais pourquoi, je sais que j’étais, qu’on m’a pris mes papiers, que y avait une enquête de DGSI derrière moi. L’enquête de DGSI elle a donné rien. Aujourd’hui je suis en train de subir, c’est mon point de vue personnel Madame, je suis en train de subir aujourd’hui la torture, que j’ai rien fait du tout. Aujourd’hui, moi si on m’a pas pris mes papiers, je m’évaderais pas, je serais pas entré en prison, je serais pas là devant vous. Moi mes papiers ils me les ont pris injustement. J’ai un recours. Je considère pas que je suis sans-papier, non. Ma présence au centre de rétention, je la trouve aussi injuste. Donc injuste pour ce qu’on me reproche, un délit que moi je trouve pas un délit, n’importe quel être humain, n’importe quel être vivant va chercher, va faire pareil, voire même mieux, peut-être il va réussir, moi j’ai pas réussi, malheureusement. Ne le niez pas Madame, n’importe quel moment que j’aura un p’tit, un p’tit p’tit p’tit point que je pourrai m’évader… C’est pas contre la loi [la juge tente de l’interrompre : « On a bien compris », c’est juste pour récupérer ma liberté. C’est tout Madame. »

La juge tente de mettre un terme à sa plaidoirie, mais il souhaite ajouter quelque chose : « J’ai pas pu récupérer le dossier pour préparer ma défense. Je sais même pas si c’est légal ou pas. S’il vous plait, c’est vous qui va me dire ça : est-ce que c’est légal ? Aujourd’hui, j’ai lu rien depuis la garde à vue, jusqu’à ce moment-là, j’ai pas eu quoi que ce soit comme papier, madame. Vraiment, ça, c’est légal ou pas ? Je sais pas. » La juge ne voyant aucune trace de ces demandes dans le dossier, choisit d’ignorer complètement sa parole.

Le procès aura duré 1h15. Les quatre, avec ou sans avocat, sont finalement condamnés à quatre mois de prison ferme, comme le demandait le procureur.

Un procès comme tant d’autres, où les prisonniers du CRA témoignent de l’arbitraire des procédures réservées aux personnes étranger.es et de la déshumanisation qu’iels subissent au quotidien dans les lieux d’enfermement.

Un procès comme tant d’autres, où la justice se place en garante de l’application des lois racistes, sans jamais remettre en question le système dans lequel elles s’inscrivent, tout simplement parce qu’elle fait elle-même partie de ce système.

A bas les CRA, à bas les frontières, soutien à tous.tes les prisonnier.es !

Un dimanche contre les centres de rétention

Récit écrit par quelques personnes venues le dimanche 3 mars devant la gare du Nord pour participer à la manifestation contre les centres de rétention.
A 14h nous sommes près d’une centaine de personnes rassemblées devant la gare du Nord. Neuf camions de flics nous attendent au niveau du boulevard Magenta et sept autres vers la rue du Faubourg-Saint-Denis, prêts à nous barrer la route vers Barbès et La Chapelle où nous voulions passer.
On décolle finalement vers 14h30 à 150 en direction de Magenta derrière une banderole disant « Solidarité avec les révolté.e.s dans les centres de rétention » et traduite en arabe. Alors qu’on a à peine fait 20 mètres un flic s’approche et nous annonce pour la forme : « votre manif n’est pas déclarée. Vous serez bloqué.e.s. ». On fait quelques dizaines de mètres supplémentaires puis on est nassé.e.s. Dans un premier temps la nasse est plutôt lâche, plein de gens y entrent et en sortent (certain.e.s pour aller differ au rassemblement à République en soutien aux révoltes actuelles en Algérie) tandis qu’environ 150 personnes restent et entonnent des slogans (« Pierres par pierres, murs par murs, nous détruirons les centres de rétention ! », « Liberté pour tou.te.s ! Avec ou sans papiers ! », « Ni police, ni charité, vive la lutte des sans-papiers ! », « Liberté, Houriya, Freedom », etc…). Sur le parvis, en face de l’entrée principale de la gare, beaucoup de gens s’arrêtent, curieux. Certain.e.s leur donnent des tracts avec le texte d’appel en français et en arabe. Pendant au moins une heure, plusieurs slogans sont entonnés avec énergie.
Le temps passe et les gens se lassent, discutent mais ne gueulent plus. Après plus de deux heures les flics commencent à laisser les gens quitter la nasse de nouveau, mais par petits groupes et escortés jusqu’au métro. Une centaine de personne reste, exigeant de quitter la nasse tous.te.s ensemble, pour rester solidaires face aux éventuels contrôles d’identité. Les flics finissent par former une haie d’honneur entre la nasse et la bouche de métro. Tout le monde l’emprunte. Ils poussent les dernières personnes dans le couloir de la station puis, alors qu’un flic, seul, tente d’empêcher l’accès à la gare, plusieurs personnes le dépassent facilement suivies du reste du cortège qui s’élance à nouveau en reprenant les slogans. Ça résonne fort dans le grand hall de la gare ! On est une centaine à gueuler en avançant parmi la foule. Les flics, qui n’avaient pas prévu le coup, sont une petite dizaine à nous suivre sans nous bloquer. On décide de prendre le RER pour aller devant le CRA de Vincennes. Un rdv à 18h à la station Joinville-le-Pont avait circulé de bouche à oreille pour aller faire entendre notre solidarité avec les retenus par-delà les murs. Arrivé.e.s aux portiques on se les maintient ouverts pour que tout le monde passe.
On est encore une bonne soixantaine de personnes lorsqu’on arrive au RER de Joinville-le-Pont vers 17h45, soit un quart d’heure en avance sur l’horaire annoncé. Ne voyant pas de keufs sur notre chemin on décide de partir sans attendre en direction de l’arrière du CRA, d’où on est plus proches des retenus. Le cortège toujours bruyant prend la route banderole en tête, perturbant ainsi la circulation, et arrive sans encombre à proximité des bâtiments. Aucun flic à l’horizon. On fait le maximum de bruit en criant et en sifflant, certain.e.s en montant sur la butée alors que celleux resté.e.s sur la chaussée guettent l’arrivée des bleus. On marque une pause pour écouter s’il y a du répondant de l’autre côté des murs puis, entendant des cris, on recule vers l’A4 pour s’en rapprocher. Des bâches ont été posées sur les grilles intérieures pour empêcher les retenus de voir vers l’extérieur, sauf à certains endroits ! On a pu voir quelques personnes à travers une fenêtre qui n’avait pas été condamnée. Ils sautent à l’intérieur, nous sautons à l’extérieur. Il nous entendent et gueulent avec joie. Idem de notre côté. Après un quart d’heure d’échange, une dizaine de camions de flics arrive mais nous avons le temps de nous regrouper. Ils nous nassent pendant 10 minutes puis nous escortent jusqu’au quai du RER. On repasse devant un terrain de foot où des joueurs, nous ayant vu un peu plus tôt marcher en sens inverse, nous relancent en scandant « Liberté pour tou.te.s ! ».
Contre l’enfermement, à bas les frontières !
N.B : Le même jour, un rassemblement contre les CRA  avait lieu à Toulouse.

Des nouvelles de l’Asilo Occupato et de la répression en Italie !

On relaye ici des articles paru sur Passamontagna:

Ils ont expulsé l’Asilo Occupato.

Ils ont arrêté 6 camarades accusés d’association terroriste à des fins subversives.


Ils ont battu et tenté de réprimer toutes les formes de solidarité qu’ils ont tenté d’apporter aux compagnons expulsés et arrêtés.
Cela ouvre un nouveau chapitre dans l’histoire du mouvement de Turin, ainsi que dans l’histoire de ce pays.
L’Etat a déclaré la guerre ouverte à toute occupation et à tout groupe ou personne qui s’organise contre ce système de plus en plus fasciste et totalitaire.

L’Asilo vivait depuis 24 ans. Il a été un lieu de rencontres, de débats et de réflexions pour des milliers de personnes. Espace pour s’organiser dans les luttes ; pour partager des dîners et des moments de fête.

C’était ennuyeux dans un quartier en gentrification, où les puissances économiques – et politiques – comme Lavazza ou les « Grandes » écoles. (Holden, etc.) ont greffé leurs bases logistiques. C’était ennuyeux parce que cela allait à l’encontre de tout ce que ces puissances prêchent. C’était ennuyeux parce que ça continuait à descendre la rue. Parce qu’il continuait à se battre. S’organiser contre les expulsions, contre cette gentrification qui éloigne de plus en plus les pauvres des centres et tue les quartiers populaires. Lutter contre les CIEs, aujourd’hui CPR, et leur système de sélection et d’exclusion qui grince des vies sur la base de la possession ou non d’un document.

Il est clair que la volonté est de détruire tout lieu d’autogestion et d’auto-organisation. Ne laisser plus de place à ceux qui pensent et s’organisent pour vivre autrement.

Ce gouvernement jaune-vert a choisi d’être le bourreau définitif dans ce mécanisme de répression totalitaire qui dure depuis un certain temps.
Des politiques de plus en plus meurtrières, racistes, xénophobes, xénophobes, de pure guerre contre les pauvres et ceux qui s’organisent contre eux. Comme à Turin, avec un cintre qui félicite la police pour le massacre de l’Asilo qui vient de se produire.

Le 270 bis n’avait pas été utilisé depuis un certain temps sur Turin comme une stratégie répressive. Les accusations de terrorisme permettent une longue détention préventive en prison. Une bonne façon de continuer à attaquer un groupe de camarades qui ne se sont jamais lassés des combats.

Ils ont été accusés de tout ce qui s’est passé en Italie contre le CPR et les sociétés de gestion des déportations ; ils ont été accusés d’avoir fomenté des émeutes dans les prisons pour migrants « irréguliers ».

La crainte que les exploités s’unissent, liée au nouveau racisme rampant, est ce qui a soutenu cette manœuvre répressive.
Cette expulsion et ces arrestations – avec une accusation aussi absurde et spectaculaire – sont un test pour le gouvernement et sa guerre vient de s’ouvrir aux occupations grâce aussi au nouveau décret « Sécurité » du clown en vert.

 

Que la réponse soit générale, dans chaque ville et dans chaque quartier.
Toute notre solidarité avec les camarades arreté.e.s.

Une forte étreinte pleine de colère envers tous les autres compagnons expulsé.e.s.

Un sourire complice pour la copine qu’ils n’ont pas pu arrêté.
Que de cette expulsion naissent 1000 occupations.

ORGANISONS NOUS.

…. La répression de l’état italien n’est pas tombé qu’a Turin, dans la foulée c’est des copain.e.s de Trento qui se font arrêter.

Sept autres camarades ont été arrêtéEs.

Des dizaines de perquisitions. 40 suspects.


Ils parlent de « cellule subversive », de « terroristes » ; ils dépeignent les personnes arrêtées comme « prêtes à tuer pour renverser l’ordre démocratique ».
Rien ne nous surprend. Aujourd’hui, le terrorisme perpétré par les médias et les journaux est du pain quotidien. Et la campagne contre les « anarchistes », les vilains noirs et méchants qui s’opposent à « l’ordre des choses » et à la « coexistence pacifique » dure depuis longtemps.

Ils ont arrêté 7 compagnons. Après la répression à Turin, ils ont attaqué un autre groupe de personnes qui s’organisent contre la militarisation, contre les frontières. Le fascisme et le racisme se battent, de plus en plus meurtriers. Qui pense et agit quotidiennement contre un capitalisme de plus en plus sournois.

D’abord Turin, maintenant Trento.

Ils veulent massacrer toute forme de pensée et d’action critique envers l’existant. Ils veulent tuer tous les groupes qui s’organisent et vivent en dehors des schémas institutionnels. Les accusations de terrorisme sont à nouveau faites pour isoler, pour essayer de briser la solidarité. Imposer de longues peines préventives et briser un groupe de compagnons engagés dans de nombreuses luttes.

Mais dans cette guerre, le terroriste est l’État et ses tortionnaires. C’est sa propagande de peur et sa pensée unique qu’il tente d’imposer avec répression et conformisme. Ses lois sont meurtrières, et aujourd’hui sa politique est de plus en plus fasciste et raciste, ce qui sépare les blancs des noirs, ce qui fomente la haine et la discrimination. C’est l’État qui fait la guerre, et dans cette guerre maintenant déclarée aux pauvres, aux marginalisés et à tous ceux qui s’organisent contre ces politiques, nous sommes tous appelés à prendre parti et à prendre parti.

 

Notre entière solidarité avec les compagnons arrêtés de Trente.
Toujours complices de ceux qui se rebellent et choisissent de se battre.

Les camarades de ChezJesOulx- Casa Cantoniera Occupata